Je ne jouerai plus à la guerre, ses cris sont à jamais bloqués dans mon estomac. Mots et maux encombrent l’horizon, je ne sais en délivrer le son.
J’ai vague souvenir de hoquets douloureux, vomis en bordure de fossé. L’herbe était si verte que j’étais honteuse de la souiller, coupable ainsi de retarder la fuite des adultes. Ils nommaient cela s’évacuer.
Je me rappelle avoir scruté le ciel, d’y deviner des drones vicieux camouflés sous le plomb des nuages. Leurs plaintes demeuraient silencieuses.
Je garde de ces faits de guerre une étrange responsabilité. De France, d’Irak ou d’Ukraine, une même peur lovée dans la chair, sensation d’interdit et impression douteuse d’en être et d’y avoir participé.
Devrai-je à jamais me sentir solidaire du chant des « sirènes » ? Celles-là faisaient gémir les chiens. Le père disait : « Les voilà qui hurlent encore à la mort ».
Je ne serai plus jamais la chienne de ces chiens.
©Jeannine DION-GUERIN
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