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2 octobre 2023 1 02 /10 /octobre /2023 06:26

 

 

          1953. J'ai huit ans, et je suis en classe au village de Saint Etienne de Fontbellon ( Fontaine de Bellius) sous Aubenas ; c'est le cours moyen dirigé par le maître que j'adore : le père Escoutay qui fait aussi fonction de maire socialiste du village : ''La Souche''. Cet homme qui joue de la guitare ressemble à Georges Brassens comme son jumeau ( ''le vent qui souffle à travers la montagne me rendra fou''....Gastibelza l'homme à la carabine...'')


         On vient d'écouter tout une série de conseils sur le respect à avoir pour notre belle et excellente langue française que bon nombre de pays nous envient...etc...etc... On est tous fin prêts pour la dictée de ce matin-là...sauf une absente, et c'est rare ! Jamais personne ne manque à l'appel de la dictée qui sera notée.
-Attention ! C'est la dictée de composition, relisez-vous bien !
-Oui, maître ! ( Réponse nourrie : fois 37, car on est 37 au cours moyen cette année-là)

 

Toutes les plumes à l'encre violette sont dans les starting blocks des encriers de porcelaine...

 

         Une seule absente : Monique Malosse, l'aînée d'une famille nombreuse, famille serrée dont tous les enfants sont nés à un an d'intervalle à peine ; c'est dire si le père est vaillant et fier...et si la mère est épuisée, femme invisible : elle a donné naissance à une vraie touffe de champignons sauvages, bouilles rondes, cheveux raides coupés courts ; ils habitent en montagne au lieu-dit ''Les Espéraïgues''où toutes les sources sont vides l'été.


         Pour descendre au village, la route est longue et ressemble à un lit de ruisseau à sec ; ils la parcourent toujours à pied, parfois en char-à banc tiré par deux bœufs. Ils apportent une petite cantine remplie de ''bombine'', ce fricot ardéchois de pommes de terre agrémenté d'un bout de lard, repas qu'ils mangent autour du poêle de la classe en hiver, un bout de fromage de chèvre et deux prunes en été, quelques châtaignes en automne...


Ah ! Ils ont du mérite ces petits paysans ardéchois, droits et vaillants par tous les temps et qui jamais ne se plaignent !


         Ce matin-là, on est tous prêts pour la dictée du matin ; le nom de l'auteur est déjà écrit en belles lettres cursives au tableau : Marcel Pagnol  lorsque :
-Toc toc toc...la porte de la classe s'ouvre
C'est l'aînée des Malosse, Monique, méconnaissable, ébouriffée comme un épouvantail de paille, le visage en sueur couvert d'égratignures et de bleus
-Bon sang Monique, dit le maître, que t'est-il arrivé ???

-Me sian toumba dédins oun bourdigas y me sian tout ingrapina lou mouré !
( Je suis tombée dans les buissons et je me suis tout égratigné la figure!)

Tout le monde a compris et personne n'a ri.

         Monique, après quelques soins généreux au mercurochrome, le visage semblable à une pomme sauvage dévorée par les renards, a fait la dictée avec nous comme d'habitude, et comme d'habitude : zéro faute, puisque c'était la meilleure de la classe. Ce n'était pas un plongeon dans les ''bourdigas''ni dans le patois ardéchois qui allait changer les choses, bien au contraire !

 

  © Jeanne CHAMPEL GRENIER            
 
 
 

 

 

 

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18 août 2023 5 18 /08 /août /2023 07:06

Photo: Wikipedia


Une fois n’est pas coutume, je publie ce jour un texte de réflexion signé de Jeanne Champel Grenier que nous aurions intérêt à prendre au sérieux au moment où une canicule sévère nous frappe. C’est un avertissement, pas sans frais, hélas ! Il est grand temps de nous réveiller ! (Jean Dornac)

 

           Par ce vide inexorable des campagnes et l'attirance tentaculaire des villes, une béance est née et ne peut que s'étendre : la terre et ses beautés naturelles, simples, offertes, ne touchent plus l'homme dans son enfance. La plupart des naissances ont lieu dans les cités loin de toute véritable nature sauvage. Il y a là un manque vertigineux inconnu et dont on n'est pas conscient dans lequel s'engouffrent de multiples quêtes qui mènent jusqu'aux paradis artificiels.

          Semé ailleurs qu'au sein de la nature vivante, de ses couleurs changeant avec les saisons, de ses parfums, de ses attentes, de ses surprises qui interrogent, le petit de l'homme ne grandira que pétri de manques inconnus ; et même les revers de la vie n'en seront que plus graves : « Plus je me plante, et plus je pousse » dit Erik Orsenna  avec son sens de l'humour enraciné dans l'expérience.

          Sans vouloir philosopher, ni donner de leçon , quelqu'un qui a vécu dans son enfance, d'abord à  la campagne et ensuite à la ville, peut parler de ce sentiment de véritable appartenance à la terre, à la vraie vie. Pour des milliards d'autres, ce sera le béton partout à l'horizon ; ce qui n'empêchera pas certains esprits ouverts de chercher à abattre les murailles de tous ordres.

          Un frémissement ''écologique'' permet de voir s'ériger des murs végétaux, des jardins sur les toits, des bacs de plantes sur les balcons, mais c'est bien loin de ce dont a besoin l'homme pour ouvrir son coeur et se sentir responsable de ce qui l'entoure : la sècheresse, les feux de forêt, les eaux polluées...puisque tout cela ne lui appartient pas, cela ne le concerne pas.

           Comment s'ouvrir aux autres si on ne s'est pas ouvert à la vie au profond de soi dès les premiers pas ? En notre enfance, il y a t-il du fond, une île, des arbres pour s'adosser un instant de doute ; y a t-il une plage où jeter quelques cailloux et entendre  le ricochet, y a t-il des racines solides qui permettent de tenter la profondeur de cet ailleurs qui abrite les autres ?

            Hélas, bien trop souvent, dans l'espoir légitime des adultes qui espèrent se forger une vie hors de la misère,  le petit de l'homme n'a rien connu de la vraie nature. Il a vécu loin de tout ce qui nourrit la vie. Il semblerait que l'extrême erreur concernant le rapport humanité / nature se situe en Chine où la politique obtuse a transformé la terre verdoyante que peignaient les artistes d'estampes en pays totalement bétonné et pollué que l'on n'a plus envie d'aller visiter. Mais restons positifs, rien n'est perdu : « Nous sommes venus par des chemins perdus à la beauté » dit le poète Jean Pierre Siméon. L'espoir est une plante qui nécessite très peu d'eau, l'espoir ne meurt pas.

           C'est à l'école qu'il faut mettre en contact les enfants dès le plus jeune âge avec la terre, la vraie, et tout ce qui vit grâce à elle ; j'ai le souvenir d'un élève qui, voyant dans un coin du jardin de l'école, du persil à huit heures du matin tout droit et vers quatre heures, couché dans un bac, s'est exclamé : « Maîtresse, il dort le persil ! » Ressuscité avec une lampée d'eau fraîche, le persil s'est redressé.

           Il était grand temps d'expliquer que les plantes apprivoisées ont besoin de nous, mais bien moins que ce que nous avons besoin d'elles ! Pensons-y, car sans cela, c'est bien nous qui risquons de ne pas dormir...ou du moins, ferons de très mauvais rêve !
 

© Jeanne CHAMPEL GRENIER      
 
 
 

 

 

 

 

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7 juillet 2023 5 07 /07 /juillet /2023 06:45

 

 

Un titre sous forme d'affirmation qu'il va bien falloir démontrer ; et je songe à l'auteur de ces mots à la fois poète et enseignante qui aurait pu donner cette phrase à méditer à ses élèves adolescents :
« Tout amour est épistolaire. » ''Vous avez 4 heures ! »
    Barbara AUZOU, elle, nous fait la démonstration à la fois poétique et sentimentale de la véracité de ces mots concernant sa relation amoureuse, en l'écrivant au quotidien et de façon magistrale, sur une période d'un an, environ, depuis le 25 juin 2021 jusqu'au 10 juillet 2022.
    Il s'agit de révéler au jour le jour que l'absence ou la présence de l'être aimé n’interrompent jamais le sentiment mais qu'au contraire, cette alternance le favorise, fortifie et enrichit l'avancée à deux, jour et nuit, dans la profondeur et le perpétuel renouveau. La présence physique épisodique, entourée de poésie et de mots vivants choisis, serait un ferment pour l'épanouissement d'un amour. :

''parce que je le confesse les mots que je murmure aux fleurs sont davantage à ton adresse'' (P.18
''Je t'entends encore m'affirmer que c'est déjà plus haut que nos vies cet amour fou jeté par poignées d'oiseaux sur les volets du murmure ''(P.32)......
''Il m'arrive la nuit de m'éveiller à l'instant même où le songe se tait alors j'enchenille les persiennes au coton blême de ma peau pour te retrouver''(P. 34)

    Dans l'écriture de Barbara Auzou, les sentiers ne sont jamais ''battus'', ils naissent aux besoins toujours nouveaux puisque le sentiment d'amour se sublime par l'absence et se réserve aux lèvres franches et assoiffées :

Je t'écris comme une fontaine de persévérance laisse un bruit d'eau sur les lèvres'' (P.17

L'amour reste est lié aux cinq sens qui par un travail de mémoire poétique incessant demeurent en
éveil :

''Tu sais comme me demeure étranger tout ce qui n'est pas immédiatement compréhensible par la peau’'(P.19)

L'amour reste à vif grâce à ce quotidien en alerte qui fait provision de beauté et de bien être partagés aidé par une commune vision de la vie :

''Raconte-moi encore la tendre histoire du temps amoureux qui se couche sur le temps pour que j’écosse mes rêves assez longtemps sur le sensible, que je retourne au ventre fauve des lenteurs vraies et au foyer blagueur de tes yeux où je monte à pas de loup jusqu'au joyeux'' (P. 31)

Ce recueil vraiment exceptionnel est le témoignage patient et vivace d' un feu entretenu à deux, un feu que l'on engendre, transporte, que l'on voit briller ; un feu qui vous rappelle de tendres et fougueux souvenirs ; un feu parfois violent qui ne vous laisse jamais de cendre sans une étincelle de secours au coindu cœur.
Lecteurs, amoureux des belles lettres, que me soit permis un conseil : ne prenez pas de notes quand
bien même les paroles de l'auteur vous paraîtraient si proches de vous, si belles ''à tomber !'' ; faites comme disent nos amis Canadiens : ''Tombez en amour ! Et la poésie de la rencontre vous donnera peut-être ce supplément d'âme et de jeunesse ardente qui rend la poésie amoureuse de Barbara AUZOU si vraie, si fraîche et profonde, si positive... inimitable.

© Jeanne CHAMPEL GRENIER
 

 
 
 

 

 

 

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20 mai 2023 6 20 /05 /mai /2023 06:55

 

 

Voici une histoire vraie, une histoire que je considère nécessaire pour l’époque dans laquelle nous vivons ! Lisez, essayez de méditer et voyez la beauté, la grandeur d’un gamin de 7 ans ! merci chère Jeanne !! (Jean Dornac)

 

On a dit bien du mal de ce peuple parti de France encouragé par le gouvernement pour peupler cette nouvelle conquête qu'était l'Algérie devenue française par les armes hélas, comme il était de triste coutume alors. C'étaient de pauvres gens pour la plupart miséreux qui, comme les colons anglais partis pour l'Amérique, espéraient avoir une vie meilleure.

 

Ces pauvres exilés, appelés Pieds Noirs à cause des bottes des soldats français de l'époque, contrairement aux Arabes qui marchaient pieds nus ou en babouches, furent critiqués, maudits par le peuple de France car l'armée envoyait de jeunes Français de métropole mourir là-bas pour maintenir cette colonie.

 

J'ai connu une famille rapatriée en France, le père instituteur disait toujours que les petits arabes apprenaient deux fois plus vite que les autres ; et la mère, Madeleine, issue d'une fratrie de cinq enfants et de famille très pauvre, avait le cœur sur la main ; d'autre part elle eut très jeune des jumeaux à nourrir dont l'un s'appelle Christian.

 

Un jour, au bled, un village nommé Aïn Farhès, et comme cela arrive ici chez nous aussi, une pauvresse accompagnée de son fils en larmes vient mendier à la porte de Madeleine ; selon son habitude elle donne de bon coeur du linge et de la nourriture ; l'enfant pleure toujours ...C'est alors que Christian, six ou sept ans, tend à l'enfant son petit tracteur jaune en métal qu'il venait d'avoir pour Noël ; l'enfant le prend et cesse aussitôt de pleurer.

 

Madeleine pourtant issue d'une famille très pauvre, elle qui a la vie dure puisque ses premiers enfants sont des jumeaux, ne fait pas un geste de regret. Elle aurait pu gentiment s'opposer :  «  Ah non, pas ton cadeau de Noël, voyons ! » Mais elle ne dit mot.

 

Une fois les mendiants partis, elle embrasse même son fils. Alors le petit Christian, le cœur gros est parti pleurer dans un coin ; il pleura longtemps son petit tracteur.…

 

 

Il est facile de distribuer le superflu ou la surabondance, mais pour ce qui est du nécessaire ?

 

Pour un enfant, le cadeau du Père Noël, c'est le trésor souhaité et exaucé. Quelle bonté faut-il avoir déjà pour se défaire, à sept ans, du nécessaire…

 

Cet enfant, sans tracteur, rapatrié d'Algérie, a grandi en France ; il a grandi, est devenu instituteur comme son père et allez savoir pourquoi, c'est moi, fille de pauvres immigrés espagnols sans tracteur qu'il a épousée.

 

© Jeanne CHAMPEL GRENIER
 
 
 
 

 

 

 

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21 avril 2023 5 21 /04 /avril /2023 06:48


 

 

*Nuit au-dessus de la montagne
jusqu'à la faim de la rivière

Un grand silence t'accompagne
Sans illusion et sans prière
Toi qui rêvais d'égalité
Le monde est encore en chantier

En bas le peuple se rassemble
Ceux qui ont pu se relever
Les autres s'avoueront vaincus
Il y a des morts à enterrer
C'est le sort qui l'aura voulu

Tu crois pouvoir chasser la mort
Avec des mots gonflés d'amour
Mais la misère ça a du corps
Ça ressemble à du vieux levain
Qui vous aigrit le cœur sans fin
Et ça ricoche de père en fils

Quand la parole devient violence
Pleins de morsures sont les mots
Muré l'espoir, les idées flanchent
Dans les cachots de noir silence
Se consume alors l'avenir
À petits feux qui font mourir

Surgiront toujours d'autres héros
Que rien ne pourra arrêter
Ils ont l'exemple en héritage
N'attendront jamais les années
Car la valeur emplit le cœur
Quand l'injustice est déclencheur
De révoltes et d'atrocités

Rien n'étouffera le jasmin
Qui s'ingénie à embaumer
Ni les oeillets sur le chemin
Les orangers ploient sous le drain
Qui baigne en continu leur pied...

*Nuit au-dessus de la montagne
jusqu'à la faim de la rivière

Un grand silence t'accompagne
Toi qui rêvais d'égalité
Sans illusion et sans prière
Le monde est encore en chantier

*Vers de Pablo Neruda

© Jeanne CHAMPEL GRENIER  

( Extrait de « POETES CITOYENS »
CONTREPOINTS- vol.3)Ed.France Libris-2018

                              
 
 
 

 

 

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14 mars 2023 2 14 /03 /mars /2023 07:59


 

À mon aïeule maternelle


 

Elle est partout et nulle part
debout au four et au moulin
pas un instant pour divaguer
mais pour chanter oui, elle est là
rien ne l'arrête et tout y passe
depuis Ferré, Brel, Mariano
jusqu'au fado et l'opéra

Quand elle épluche les oranges
que lui a données le primeur
des maltaises toujours trop mûres
pour ceux qui ont la bourse pleine
elle entonne un refrain étrange
qui parle vin cuit, et vanille
et d'une recette de Murcia
que lui donna Maria sa mère

Le chaudron bout, c'est un vieux clou
non pas ces beaux reflets de cuivre
qu'on voit sur les dessins du livre
qui vient de Palautordera
caché dans son sac d'émigrée
alors qu'elle ne sait pas lire
À soixante ans, il est trop tard

Il est si vieux ce bouquin là
venu du pays en révolte
ces quelques mots en catalan
dont elle connaît les images
ce petit livre tout en miettes
qui traversa la France libre
bien plus sacré qu'un beau missel
''mi-sel mi-sucre'' disait-elle !

Soudain elle se sauve en courant
l'heure de quérir les enfants
Et au goûter que va-t-on faire ?
Il est déjà la fin du mois
du pain perdu ? ou bien grillé ?
avec juste un petit ''raj d'oli''
non pas de beurre, ici, jamais
ni flan ni crème, c'est gaspiller
la nourriture, c'est pour survivre

Mais elle a dans son tablier
quelques fruits mûrs qu'elle a trouvés
sur les chemins de la commune
C'est la glaneuse de Millet
elle est courbée mais sait chanter
et même ''Aux armes citoyens !''

Elle travaille sans arrêt
à réparer la société
sans cri, sans grève et sans hurler
Elle est partout quand on l'appelle
et chante du soir au matin
Bien sûr qu'elle pleure en secret
elle n'a pas le moindre blé
mais elle sait se contenter
elle est en vie et jamais seule :
Lorca, Neruda, De Falla
Pablo Casals et Cerruda
Son cœur déborde de musique
l'amour des autres, c'est l'Amérique !


( Extrait du recueil  : L'EXODE :Ines, Faustino et les autres...)

 

© Jeanne CHAMPEL GRENIER      
 
 
 

 

 

 

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5 février 2023 7 05 /02 /février /2023 07:57

Lannion - Photo Jdornac©

 

EN HOMMAGE À CHRIS BERNARD ET À SA BELLE REVUE DE POÉSIE PORTIQUE ( 32 ans de parution)

 

J'aime les maisons antiques
Où derrière la rouille des portiques
Les longs paons bleus se balancent lentement
Au rythme de la valse à trois temps

J'aime les intérieurs au faste finissant
Les colonnes verdies, les chapiteaux romans
Les chinoiseries d'or sur les papiers dépeints
Les vieux fauteuils chaussés de précieux escarpins
Les consoles de marbre toujours inconsolables
Les couloirs où miroitent d'ineffables
Conciliabules de soupirs et de larmes

J'aime les galeries-fleuves envahies de tapis
Qui glissent comme nuages bleuis
En laine de Hongrie et douceur Véronèse
Croisant les cheminées sans braise
Les frontons gravés de belles armoiries

J'aime les grands tableaux de chasse
Ces reliefs de gloire émouvants
Tandis que le temps passe
Et passe inexorablement

J'aime les immenses parcs mutiques
Les jardins où s'étoffent les mousses
Avec pour seule et unique musique
le chant de la rainette rousse

J'aime les maisons antiques
Où le silence tient lieu de paravent
Aux grands paons bleus si nonchalants
La nuit semée de neige galactique

© Jeanne CHAMPEL GRENIER
 
 
 

 

 

 

 

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12 janvier 2023 4 12 /01 /janvier /2023 07:17

Dessin : www.francetvinfo.fr/culture

Texte magnifique de révolte, juste et nécessaire offert par Jeanne Champel Grenier ( J. Dornac)


Des femmes qu'on tue parce qu'elles montrent leurs cheveux, des hommes qu'on torture et qu'on pend parce qu'ils défendent la liberté, des mères et des pères qui hurlent de douleur au pied des gibets...et partout des enfants qui crèvent de faim !
Un million de croix sur la Méditerranée !

 

À quel âge, la retraite pour eux ?

 

Poètes, je veux bien qu'on dise la force
des mots d'amour qui réconfortent
mais il faut se garder de croire
que nos paroles vont guérir
les suppliciés, c'est illusoire
Quelques miettes de bonté
ne vont guère multiplier
ni ranimer la raison morte

 

Un pain rassis et deux poissons
voilà bien ce que je leur offre
en quelques mots avec ma peine
car rien ne va ressusciter
l'amour, la joie et le respect
qui tissent des journées de paix
et d'humanité pérenne

 

Vont-ils accoster notre vie
nos frères et sœurs d'Outremonde
eux que nous avons démunis
à force de piller la terre
qui meurt de peur et de douleur ?
Mais quel silence la misère !
Rien qui n'empêche de dormir ?

 

Je veux bien qu'on dise la force
des sentiments qui réconfortent
la tendresse, la poésie
sur une musique sereine
mais RIEN ne vaudra la révolte
contre l'hérésie et la haine
rimant avec cent mille volts !

 

© Jeanne CHAMPEL GRENIER                                          
 

 
 

 

 

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20 décembre 2022 2 20 /12 /décembre /2022 07:41
Tableau de Gustave Moreau : « Salomé dansant »


 

Pour toutes les personnes aimant la poésie et la peinture, je ne peux que recommander ce superbe recueil, n’hésitez pas à vous le procurer ! (Jean Dornac)

 

 

Elle est là, elle avance
corps face au spectateur
visage de profil
Armée de nudité
brodée, revendiquée
elle avance, elle est là
en place du bourreau
la tête de Saint Jean
sur un plateau d'argent

Blancheur de lait d'ânesse
des ivoires antiques
le corps dans un fourreau
de dentelle de soie..
Et brille sa peau blanche
qui fait rêver le roi

La tiare au lion de Perse
fleurs de lotus au ventre
elle avance et vous berce
déesse somnambule
prêtresse orientale
voilée de libellules

Rêvée, satin de Chine
peau de neige brodée
toute blanche elle avance
telle une épée dans l'air
au tranchant raffiné
de chryséléphantine

Elle avance en silence
ni luth, ni gong, ni sistre
aura de dessin pur
qui guidera l'artiste
au geste tendre et sûr
plus loin qu'il ne le pense

Rouge et or le décor
d'Orient fantasmé
Univers opposés :
Nudité et Mihrab
reliés par le peintre
Elle avance, elle danse
L'artiste a peaufiné
la châsse du mystère

Ainsi va l'Art sacré
tatouages des rêves
toujours inachevés
qui brûleront Moreau
sans cesse à fleur de peau

 

Extrait du superbe recueil : TABLEAUX D'UNE EXPOSITION, éditions France Libris
 
© Jeanne CHAMPEL GRENIER                                      
 
 

 

 

 

 

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21 novembre 2022 1 21 /11 /novembre /2022 07:36


Dessin de Jeanne Champel Grenier

 

Bleu, le ciel d'amplitude inespérée
Blanche, la terre sous les reins
Brûlante l'épée du soleil
Entre les branches d'orangers
Qui filtrent les rayons de feu

Au loin le duende des vagues
Sous leur résille de sel
Et par tièdes et tendres rafales
Le moussant parfum du jasmin
Qui déborde des jardins

Seul dans un corps en feu
Danse un cœur Carmen
Et son éventail qui vibre
Au filigrane orgueilleux
Du dangereux l'équilibre
Entre ollé et amen

Incluse dans la terre des ancêtres
Grenade au profond d'une fleur
Chuchoter et s'emplir le cœur
Des ''Légendes du Guatémala''
Castagnettes et guitarillas
De Miguel Angel Asturias

Rouge, le ciel d'amplitude dévoilée
Rouge, la terre sous les reins
Rouge, l'épée du soleil
Et sentir vibrer sur ses tempes
Les cigales des maracas
Et le son des bandjos
De Chichicasténango  

 

© Jeanne CHAMPEL GRENIER                              
 
 
 
 

 

 

 

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