Le ciel était d'un bleu comme seule l'Italie les invente
Avec de profonds degrés, des douceurs émouvantes
La chaleur épongeait les ombres les plus denses
Des cyprès de cigales assoiffés de silence.
Alourdie que j'étais de mes siècles passés,
Les yeux défaits, le cœur en déshérence
Ne sachant pas de quoi demain serait tissé,
J'entrai dans la chapelle isolée de Giotto...
Que ne l'avais-je visitée mille ans plus tôt !
Il me sembla voir le ciel, les nuées s'engouffrer
Avec moi, tant le fond et la fresque étaient bleus
Çà et là sur la paroi céleste volaient des anges,
Des anges gais comme on n'en voit nulle part
Oiseaux ou papillons, créatures en suspens
De pures figures rêvées simplement oubliées
Et naïvement présentes en gestes familiers.
Tendrement penché, Saint François d'Assise
Versait la manne en poussière dorée
Devant les oiseaux rassemblés sur la terre :
Communion du silence dans les mains du mystère...
Tout en buvant à pleins poumons
Au bleu profond des voûtes de l'église
Je crus entendre une voix au milieu des nuées
« Quoi de plus doux en ce monde enténébré
Que le chemin de Giotto qui mène à Assise »
Je calai bien mon âme entre deux pierres d'or
Et sortis retrouver ma dépouille dehors
Après quoi je repris ma vie démesurée
Avec un grand trou bleu dans le cœur emmuré.
© Jeanne CHAMPEL GRENIER
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