Depuis des lustres
La vieille dame recluse
Vivait avec son chat.
Il comblait sa solitude,
Elle l’aimait,
Tendrement.
Un jour Elle tomba
Morte définitivement
Anonyme
Ignorée des vivants,
Pour Elle c’était la fin.
La faim qui tenailla le matou.
Il l’aima.
Beaucoup.
aujourd’hui plus passionnément redescendue
dans les demeures profondes du songe
je dors au scaphandre de nos désirs fendus
que battent deux rames de patience
comme la première intention des mains
et à l’éponge du plus tendre de soi déjà parti en mer
je mesure ce peu de distance qui nous sépare encore
du soleil du thym sauvage et du cumin
que l’on foule au matin comme des ors
d’icônes parfumées
Les feuilles blondes tombent de l’arbre.
Sciure d'automne frissonne sous le ciel,
sous le pas des rares passants,
parmi le croassement des corbeaux
qui fend le silence de novembre.
Ce silence d’or capable de rompre les étoiles,
de tordre les troncs burinés des érables,
capable de mordre les nuages,
d’effrayer le cœur tendre
des abeilles d’or encore écloses.
Ce silence de novembre
capable d'ensevelir
les fragiles souvenirs du soir,
de briser l'or des feuilles d’automne,
d’assombrir le bronze des meules de blé,
de piétiner l’argent des éteules.
Ce silence qui s’accroche aux étoiles,
froisse l’infini de mon ciel d’enfance.
L’empreinte de cette feuille éblouissante
elle me sourit de la pluie
avec laquelle elle ébauche la tendresse
c’est l’herbe abattue sous la pesanteur de l’envie
ses yeux traînent sur les cimes du coucher
leur tendresse est peinte sur ses lèvres fines
mon âme la cherche chaque été
elle est l’empreinte de cette feuille éblouissante
c’est la pureté de ce rocher vierge
seule la pluie me lave les péchés de mes tristesses passées
j’attends le levant tel un oiseau pétrifié
au-dessus d’un seau renversé
Il était une fois trois frères qui sillonnèrent la Provence.
GAROU, l’aîné, naquit avec le vent émeraude sur le rocher de la cité corsaire.
AUBANEL, le deuxième, vit le jour dans un berceau tressé de feuilles de vignes des Climats de Bourgogne.
TAVAN, le cadet, ouvrit les yeux au pied de la Butte Montmartre.
GAROU affectionne les crêtes venteuses du Haut-Vaucluse.
Fasciné par le Mont Ventoux, il part quotidiennement à la conquête du Mont Bleu arrimé à la plaine du Comtat.
Ventoux, tu es ce berger à la silhouette altière parfumée de thym et de lavande sauvage ; terre pastorale aux drailles fleurant le suint et le crottin.
Revoilà le vent qui brosse ton univers minéral et découvre tes épaules érodées de soleil.
GAROU le sait bien, le bonheur s’acquiert par l’effort sur les chemins de traverse sous la valse du vent.
Là-haut où bruissent les roches éboulées et ruissellent les pierrailles, le géant de Provence a le visage de la beauté.
Ventoux, sur ton versant clair, emporté par les courants d’air chaud de l’adret, un aigle tourne, monte en vrille et redescend vers l’ubac.
A la faveur de sa plume bleu-mistral, le vent a écrit ce poème :
ODE au VENTOUX
Ô vent qui avec élan
Peint de l’aube au couchant
Ciels audacieux et tourbillonnants
Ô Ventoux
Sentinelle de pierres
Sombre forêt de conifères
Nudité de lumières
AUBANEL a choisi le chemin des ocres : Bédoin, Mormoiron et Roussillon, l’ocre du pays d’Apt sur les sentiers du Luberon.
Mémoire des lieux et des hommes, les falaises ocres et rousses sont ourlées de cistes à feuilles de laurier et rythmées çà et là par le vert des pins d’Alep.
L’union du minéral et du végétal a façonné une gamme de couleurs à jamais installées sur la palette d’un peintre.
L’alliance d’un jaune lumineux et d’un rouge profond a crée ce poème :
OCRE
Te voilà Roussillon
Ocre Luberon
Palette fauve et verte
Aux pinceaux de silice
Ta coiffe ferrugineuse
Brode les Demoiselles
Ocre, jaune-orangé et rouge
Magiciens d’un relief émergé.
TAVAN aime aller à la rencontre des vignerons.
Sur la Butte Montmartre, il en a caressé des ceps noueux et des grappes charnues aux reflets bleutés, mais l’appel des galets des Côtes-du-Rhône s’est vite fait sentir.
La vigne est sa passion. Il n’a cesse d’arpenter sols caillouteux, éboulis de pentes, avec un engouement pour les coteaux ensoleillés.
Lors d’une nuit de Bacchus à Suzette, village du versant oriental des Dentelles de Montmirail, TAVAN a rencontré Corine, vigneronne au talent impression soleil couchant. Autour de son vignoble, elle fait découvrir son terroir avec, en accompagnement, un muscat blanc sec du Ventoux sur un fromage de chèvre au miel truffé.
La vigne régale et inspire. Il faut s’y plonger jusqu’au racinaire dense, odorant au goût d’épices et de coing .
Plénitude, jaillissement intime autour de la lyre d’un poète, tandis qu’au loin, le Ventoux, couleur bleu indigo, cueille la première étoile.
Heureux de leurs chemins de lumières, les trois garçons reviennent à Malaucène.
Main dans la main, à trois voix, ils déclament ce brin de poésie :
M a l a u c è n e
Féminine aux yeux de campanule
Ton charme discret opère sa mue
Icône et profane
Tu es source de lumières
Ton corps se déploie en harmonies vertes et blanches
Si passe le vent d’automne
Ta toison fauve coiffe vignes et vergers
Quand vient le mistral
Tes longs cheveux s’envolent
Vers un songe mystérieux.
R.S. Automne 2022
SOURCES :
Le Mont Ventoux offre une dissymétrie climatique allant de la canicule estivale à des froids pétrifiants l’hiver jusqu’au printemps.
Sur ses pentes raides plein sud pousse une flore méditerranéenne tel le genêt scorpion, tandis que sur son versant nord fleurit la saxifrage, plante herbacée rencontrée également au Spitzberg.
Sous des ciels audacieux, cheminant de l’aube au couchant, vous aurez peut-être la chance de rencontrer le Silène de Pétrarque, plante qui n’existe au monde que dans les pierriers sommitaux du Mont Ventoux.
A la caractéristique tige collante, elle fleurit rose et aurait inspiré le célèbre poète italien du Moyen Âge, François Pétrarque.
L’histoire des ocres de Provence a commencé il y a cent millions d’années (période du Crétacé).
Le pigment si particulier des ocres provient d’une argile (la kaolinite) et d’un hydroxyde de fer (la goethite).
L’ocre, ce colorant naturel a été utilisé très tôt par l’homme dans les domaines de l’art pour les peintures pariétales.
Une belle adresse : Conservatoire des ocres et de la couleur. Ancienne usine Mathieu – Roussillon (84). www.okhra.com
La culture de la vigne est très ancienne en Vaucluse.
Introduite par les phocéens en 600 av. J.-C. quand ils s’installèrent sur les bords de la Méditerranée à Marseille.
Pline l’Ancien signalait un vignoble aux environs de Gigondas.
Avec l’installation des Papes à Avignon, la vigne s’est considérablement développée.
Le cépage muscat à petits grains d’origine grecque viendra faire la renommée du muscat de Beaumes-de-Venise - Venise étant une déformation de Venaissin (Comtat Venaissin).
Le Vaucluse présente une grande variété de roches où prédomine une composante calcaire et argileuse. Citons aussi les marnes des Dentelles de Montmirail, les grès siliceux, sables et grès miocènes de la plaine du Comtat Venaissin.
La palme revient aux terrasses quaternaires riches en galets ; leur plus belle expression se rencontre dans le cailloutis de quartzite à Châteauneuf-du-Pape.
Le département de Vaucluse se trouve dans l’aire des Côtes-du-Rhône méridionales.
3 appellations se partagent le territoire : AOC Côtes-du-Rhône
AOC Ventoux
AOC Luberon
Les cépages rencontrés sont : Cinsault, Mourvèdre, Carignan, Syrah, Grenache noir, Gros Vert, Clairette, Grenache blanc, Viognier et Roussanne.
Qu’est-ce qu’un cépage ?
C’est un type de plant de vigne caractérisé par des particularités biologiques. L’ampélographie est la science qui étudie les cépages, analysant la forme des feuilles, des grappes, des baies, leur couleur et leur apparence. Un Traité général de viticulture, dit aussi « l’ampélographie Viala et Vermorel » en sept volumes répertorie 5200 cépages.
Citons également le délicieux raisin de table Muscat du Ventoux avec ses grappes aux baies couleur bleutée, recouvertes de pruine(pas de blanc, exclusivement en raisin noir).
L’aire d’appellation de l’AOP(1999) Muscat du Ventoux s’étend sur 56 communes du Vaucluse, terroir emblématique avec 5700 hectares de vignes.
Le bouquet final est laissé à Jean Giono…une caudalie jusqu’au bout de la nuit !
« … Et, sans fin, les vignes aux vignes s’ajoutent et se rapiècent ; ouvrent et ferment et rouvrent les éventails de leurs races, couvrent les plaines, entrent dans les vallées, emplissent vallées et vallons, suintent jusqu’au plus étroit des combes, escaladent les collines, se déversent par-dessus les cimes, coulent de l’autre côté, s’étalent en océan immobile, avec des houles et des rouleaux… » Arcadie, 1953
Je suis l’arbre à poèmes
Dans le clair-obscur
D’une forêt cathédrale
Aux vitraux ciselés
Par les jardiniers semeurs d’espoir.
Dans ce temple de verdure
Exhalant mille parfums
Ma sève fourmille de rêves encrés
Jusqu’au bout de mes feuilles.
Malmené par des vents hostiles,
J’ai élagué les rameaux stériles
Gardant ramilles et brindilles
Pour libérer ma couronne,
Que les mots respirent
A l’envolée de la chorale ailée.
J’ai ouvert la ramure
De mes branches charpentières,
Sanctuaire des insectes mellifères,
Que l’eau du ciel pénètre
L’appel de mes jeunes pousses.
Amoureux de l'écriture, poésie, romans, théâtre, articles politiques et de réflexions... Amoureux encore de la beauté de tant de femmes, malgré l'âge qui avance, la santé qui décline, leurs sourires ensoleillent mes jours...