18 mars
Quelle ardeur te propulse au coeur de ton semblable,
Recherchant un miroir en l’humeur du moment ?
Ne t’aventure par sur le sol malléable,
Reste ferme à ton poste et donne assidûment.
19 mars
Je regagne ma place au poste d’aiguillage
Pour surveiller de haut la juste direction.
En jaugeant d’un coup d’oeil l’effort d’appareillage,
Je ne laisse passer aucune inattention.
20 mars Passer, laisser passer, offrir libre passage…
Toujours en mouvement, le mot lance des ponts.
D’une rive à une autre, il sert le bon usage,
Il tisse des liens, suscite des répons.
21 mars
Le choeur de la nature appelle nos répons,
Amplitude sonore au lent balancement.
Ce fragile équilibre, hélas, nous le rompons,
Sans cesse renvoyés au recommencement.
15 mars
Le monde repoussé s’éloigne dans l’espace
Et je puis résister à ses coups de boutoir
La guerre et la terreur ne mènent qu’à l’impasse,
Aux étals surchargés dans un vaste abattoir.
16 mars
Qu’est-ce qui s’accumule à l’étal des années ?
Rides barrant le front, ocelles sur les mains,
Echine s’arcboutant aux parois des journées,
Fatigue dans les yeux, figure en parchemin !
17 mars
Visage en parchemin ressemble au palimpseste
A décrypter sans faute avec un décodeur.
Son message caché ne devient manifeste
Que si mon empathie égale mon ardeur.
11 mars
Je préfère arpenter le promenoir des brumes
Sur la scène de l’aube au translucide éclat.
J’y dépose en marchant mon fardeau d’amertumes,
Toute difficulté remise alors à plat.
12 mars
Si la difficulté demeure horizontale,
Elle est changée en route où fleurit mon trajet.
Elle n’a plus sur moi son emprise fatale
Mais devient à la fois la voie et le projet.
13 mars
Chaque voie est en somme ordinaire ou royale
Suivant notre façon de la considérer.
Selon le premier pas, l’influence initiale
Rétrécit la vision ou permet d’espérer.
14 mars
La vision se fait large à ma gauche, à ma droite.
Au-dehors, au-dedans mon espace vital
S’intensifie et croît, quitte la vue étroite.
Le monde en même temps perd son attrait brutal.
8 mars
Dans sa course la plume ignore les écueils.
Elle écrit les climats, rédige les ambiances.
En sondant l’alphabet elle emplit des recueils,
Sa vaillance éludant toutes les obédiences.
9 mars
Le cran et la vaillance, en suis-je assez dotée
Pour affronter le sort à chacun réservé ?
Comme le meilleur pont, ai-je bien ma butée,
Contrefort préservant du péril aggravé ?
10 mars
Mais le péril nous guette à chaque coin de rue,
Masqué sous le soleil, embusqué dans le noir.
Il prend souvent l’aspect d’une coquecigrue
Qui, dans notre théâtre, hante le promenoir.
4 mars
S’interroger à neuf, douter, remettre en cause,
Sont les trois marchepieds du piéton des hauteurs.
Il grimpe sur la crête et s’accorde une pause
Aux replats, révélés du sentier des guetteurs.
5 mars Guetteur par tous les temps, option à part entière,
Quel champ de découverte offert en continu !
Qui s’engage à franchir l’invisible frontière
De l’avant à l’après n’est jamais revenu.
6 mars
Panorama d’avant, perspective d’hier,
Et pays sans confins promis outre-limite
Sont comme un éventail mi-clos ou grand ouverts,
L’un pulsant simple histoire, et l’autre vaste mythe.
7 mars
Une histoire jaillit du fond de l’encrier,
Ruisseau de mots pressés remontant à la source.
L’eau sourd à la lisière, auprès d’un coudrier,
Et de goutte en filet se précise sa course.
1er mars
L’heure est un univers, un tout, un infini,
Elle déploie en nous l’éventail des secondes.
Soixante fois soixante assemblent dans leur nid
Trois mille six cents heures de repenser le monde.
2 mars
Heurs et malheurs ne font qu’une paire boiteuse.
Les dieux le savaient bien, puisant, indifférents
Dans la jarre des maux, gestion calamiteuse
Pour les humains livrés à ces oublis flagrants.
3 mars
L’oubli se manifeste aux esprits encombrés.
Dès lors rien ne va plus sur le damier des cases.
Tous les jeux sont faussés et déséquilibrés,
La cause et ses effets courent sur d’autres bases.
26 février
L’usure quotidienne au ras de l’existence
N’arrivera jamais à me prendre au filet !
Toujours rebondissant, j’étrécis la distance
Qui sépare mon chant de son prochain couplet.
27 février
Couplet d’une chanson unie à son refrain,
De l’univers surgie, y repartant sans cesse.
La ronde tourne en boucle avec le même entrain,
Eternel mouvement, symbole de jeunesse.
28 février
Le mouvement sans trêve est mon gage de vie,
Continuel échange entre esprit, âme et corps.
De ce choix dévolu, jamais je ne dévie,
Jusque dans le sommeil il me trouve en accord.
29 février
Le sommeil m’est permis juste tous les quatre ans,
Seulement dans le creux de l’an dit bissextile !
Hors du calendrier, il rentre dans le rang,
Un besoin pour d’aucuns, pour moi heure inutile.
Peinture de Louis Le Nain - Maréchal à sa forge - 1640
19 février
Ce qu’il faut décrypter, c’est le sens sous le mot,
Ce qui cherche à se dire ou qui se voit omettre.
Je m’exerce à comprendre un texte à demi-mot,
C’est un feu sous la cendre ouvert à l’oeil du maître.
20 février
Qui est dans l’absolu le maître du brasier
Allumé de couleurs, crépitant d’étincelles,
Sinon le forgeron, l’expert arquebusier
Prêt à délivrer l’or d’occultes escarcelles ?
21 février
Sous l’action du souffler émerge l’or vivant,
La parole éclatante en cluster de lumière.
Elle rayonne alors et nul dorénavant
Ne peut la renfermer dans sa gangue première.
22 février
Je cherche le filon, il est beaucoup de gangues,
La pépite a la sienne au fond du minerai.
Les vertus, les valeurs demeureront exsangues
Si l’orpailleur actif ne crée un geste vrai.
Grandir tel un érable, un saule, un peuplier,
Prendre garde aux moissons, aux promesses de gerbes,
Endosser la nature parmi les folles herbes !
17 février
Folle est ma randonnée en terre imaginaire,
C’est comme un double-monde où se réfugier.
Du lointain retentit son appel missionnaire :
En premier vient le verbe, à privilégier.
18 février
Le verbe est à lui seul une théologie !
A la périphérie, au centre, il est partout,
Dans la démagogie et dans la liturgie,
Usé, changé de sens par plus d’une manitou.
Amoureux de l'écriture, poésie, romans, théâtre, articles politiques et de réflexions... Amoureux encore de la beauté de tant de femmes, malgré l'âge qui avance, la santé qui décline, leurs sourires ensoleillent mes jours...