Le « nez de Cléopâtre eût-il été plus court,
La face de la terre en eut été changée » :
Cette sentence-là de Blaise partagée,
Reconduit celle-ci… de moindre basse-cour !
L’aliment fait l’Histoire et les lieux qu’il parcourt
En sont marqués, surtout leurs gens. Fussent dragée,
Pourpre ou velours, thé, cacao, leur apogée
N’a-t-elle pas un temps vaincu plus d’une Cour ?
Il en est un, royal, dont la fatale absence,
Ayant privé les grands de sa mystique essence,
Combien de leurs dessert l’eussent fort bien greffé.
En de lointains séjours par défaut de qahwas,
La torréfaction du genre autodafé,
Se choisissait des Jeanne en guise de divas.
© Claude Gauthier
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CAFE
Lequel, capable sut parmi tous les breuvages,
En France où sont les vins manière d’érudits,
Installer telle arène où se côtoient maudits,
Bourgeois, sainte-nitouch’, défroqués et sauvages ?
Le Caf’Conc’ à lui seul, mêla les arrivages
Divers et variés, de tous les interdits,
Et la Chambre et la Cour, avec ou sans crédits,
Sans qu’en pâtît l’arôme offert à leurs clivages.
Il n’est de parfums ni, de liqueurs, de ragoûts,
De feuilles à fumer, de stances, de bas-goûts,
Qui l’emportassent non, en projets elliptiques :
Sur les bravades de cent mondes assoiffés
Et dont les serviteurs, gommeux, épileptiques*,
Leur servaient nos contrats de mille et un cafés.
© Claude Gauthier
* engeances comédiennes y donnant spectacle
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CAFE
Ah, breuvage étonnant que l’on ne saurait taire ;
Sans altérer l’esprit il transcende le cœur,
Distillant un nectar mi- grave, mi-moqueur…
« Il manquait à Virgile et qu’adorait Voltaire *» !
Le souci qu’on en a, pour le moins feudataire,
En appelle aux parfums d’un Orient vainqueur
Qui nous mène a quia, à ce point sa liqueur
Fille de drus soleils, nous tient, un rien sectaire.
Sa force fait lien, il s’invite à l’envi ;
Chacun, clauses aidant, s’en délecte ravi,
Insigne calumet de pauses inspirantes.
Au signal reconduit, l’argument fieffé
Nous sert, rite magique aux senteurs pénétrantes,
L’énigme d’une ébène… ô, rassurant café !
© Claude Gauthier
* tiré des Trois Règnes, de Jacques Delille
Extraits du Recueil « 40 Sonnets » de Claude Gauthier
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