"Qu'attendre, le temps travaille pour nous, ma chère ! Sur notre chemin, avec nos mains tendues, une mésange, une tourterelle, une lune ; elles disent la durée inconsidérée de notre union, parfois du froid mais toujours des retours à nos corps défendant et à l'amour revenant, le partage du printemps, de ce qui sauve mais de quoi ? Avec la lune pleine qui éclaire nos corps enlacés, et la mésange et la tourterelle qui prédisent le temps à partager ; Amour à tenir sauvegardé, Amour du peu de nous deux, de tout le trop de nous deux… le nôtre nous-mêmes ?"
Par Dellex — Own work (Computergrafik), Domaine public
Poèmes Lauréats Concours Jeunesse SPF 2021
Je laboure un sillon d’étoiles emplumées
d’une foi félonne
pour le vol millénaire vers un bout d’espoir
Le soleil déploie ses ailes lumineuses
sur des matinées criblées d’infections nocturnes
Il m’appartient de façonner mes pas lagunaires
empourprés de poussière liquéfiée
de tailler les ombres ankylosées
qui picorent la lumière du chemin
d’ériger sur chaque rêve le cri venteux
qui dépoussière le ciel
Il m’appartient d’aplanir les plis de la mer
froissée par des vagues de débauche
et « d’insouvenance »
dire cette terre écumeuse
débroussée de toutes mémoires
Il m’appartient de recoudre la veinule fraternelle
lacérée par des vautours maliens
où la blancheur des dents se déguise en rougeur de sang
Et ma Côte d’Ivoire,
Côte d’avarice et d’amours varioleuses
où le temps s’alite sur les feuilles de manioc
et cette Biélorussie variqueuse
dont le destin du peuple baigne dans la pataugeoire
Je vous prête mon chant, vous astres qui voletez
dans la volière noire fumante du ciel
Je suis liminaire d’une nuit falote
qui pourchasse le jour au plus loin
des horizons laiteux
ma foi est plus aigre qu’une comète venimeuse
J’endure le déluge des viols constitutionnels
et je recouche ma douleur
comme un soleil dans le nid de la mer.
Délice MANKOU
– TERMINALE – PRIX DU TAPUSCRIT DES LYCEES 2020-2021
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Un baiser sur tes lèvres ouvertes rouges et or
Caresses prodiguées par mille sur ton corps
Cela fait, si je compte
Mille et une pensées réunies en un conte
Avouées sans un mot en marques de tendresse
Brodées or sur kaftan, mille et une promesses.
Il a plu,
Comme l’on pleure à regret
Sans violence, sans arrêt.
L’eau s’épanche sur la margelle des yeux.
Le feuillage verse à flot.
Aux rives de peau, le sel.
Il a plu,
Comme l’on pleure soulager
Dans l’abondance, sans regret.
Il est un silence
Plus émouvant qu’un silence d’homme.
Un silence
Où la brise emplit le vide,
Cueille l’aiguille d’un ciel-pin,
Où la brise trouble le vide,
Cueille l’œil au coin du matin.
Mon histoire est fantastique, elle n’a ni début ni fin, elle se perd dans la nuit des temps. Il faut pourtant bien commencer quelque part. Il y a quelques milliards d’années, j’habitais un astéroïde de glace et de poussière voyageant à travers le cosmos silencieux. Je passais mon temps à méditer, rêver et me perdre dans la contemplation des étoiles. Depuis l’espace, elles ressemblent à de magnifiques joyaux. Je suis une goutte d’eau, c’est pour cette raison que mes amies m’appellent « Gotita ». Inutile de préciser qu’à cette époque, j’étais une gouttelette tout à fait congelée.
Un jour, l’astéroïde percuta la terre, quel choc! La planète qui bouscula ma vie était très différente de celle que l’on connait aujourd’hui. Ils ne lui avaient pas encore donné de nom : rien qu’une sphère envahie de volcans et de lave. Quant à l’eau, on en trouvait bien peu. La collision fut si forte, que toute la glace de l’astéroïde se transforma instantanément en une vapeur légère. Ils appellent ça vaporisation. Ce n’est qu’un mot, et... Il n’y a pas de mot pour décrire ce moment prodigieux.
Ainsi, ma vie de terrienne débuta dans les nuages. De temps à autre, je m’efforçais d’atteindre le sol, mais pas moyen ! Cette planète était un véritable enfer. Impossible de poser un pied sur sa surface. La chaleur était plus forte, elle me renvoyait toujours vers les nuages.
Mais la planète refroidissait, et j’appris un nouveau jeu : accrochant mon petit corps de vapeur à un grain de poussière, je réussis à me transformer en une véritable goutte d’eau. Ils appellent ça condensation. Ce n’est qu’un mot, et aucun mot ne peut décrire cette sensation extraordinaire.
C’est depuis cette époque qu’on me surnomme Gotita. Être plus lourde est un avantage lorsqu’on on veut chuter jusqu’au sol. Ils appellent ce phénomène précipitation. Ce n’est qu’un mot, et moi, ce qui me plait avant tout, c’est la pluie.
Ellen Fernex a parcouru le monde durant tant d’années qu’elle sait parfaitement de quoi elle parle, et son humanisme fait énormément de bien !
Tant de regards au monde
comme des ondes profondes…
Tant et tant de regards
qui viennent de toute part !
D’Europe ou bien d’Afrique,
d’Asie ou d’Amérique.
Des villes et des campagnes,
des vallées et montagnes,
des déserts et forêts,
des savanes et marais,
des deltas et plateaux,
des banlieue et hameaux.
Regards :
ces miroirs ambivalents
du dehors et du dedans ;
du dehors, l’environnement
et les événements ;
du dedans, les bouillonnements
et leurs jaillissements.
Ces regards
qui s’infiltrent et pénètrent
tout au fond de notre être,
qui pleurent ou bien qui rient
qui se taisent ou qui crient ;
qui s’ouvrent ou qui se ferment,
qui haïssent ou qui aiment ;
qui chantent ou qui supplient,
qui gémissent ou sourient
qui doutent ou qui appellent,
tous, ils nous interpellent.
Ces regards sur la terre
comme autant de lumières
qui vivent et scintillent,
qui s’éteignent ou qui brillent,
dans les nuits, dans les jours,
hier, aujourd’hui, toujours,
Regards
de soie ou de métal,
d’eau trouble ou de cristal,
de soleil ou de brume,
d’étoile ou bien de lune.
Regards
énigmes où l’on se perd,
déserts où chacun erre ;
bourbiers où l’on s’enlise,
alcools où l’on s’enivre ;
jardins où l’on fleurit,
étés où l’on jouit ;
flammes où l’on se brûle,
abîmes d’où l’on recule ;
cendres qui nous consument,
aurores que l’on hume.
Regards
épées qui transpercent
ou brises qui caressent ;
poisons qui démolissent,
coups de poing qui meurtrissent ;
sources qui désaltèrent,
ou murs qui désespèrent ;
printemps qui réconfortent
ou fleurent qui emportent.
Tous ces regards du monde,
c’est la vie de ce monde ;
ses interrogations
et ses fascinations.
Le monde en gestation
dont nous sommes un maillon.
Ces regards sont tous frères ;
par-dessus les frontières,
les langues et les coutumes,
les peaux blanches ou brunes,
ou noires, ou cuivrées,
fraîches ou bien ridées ;
par-dessus religions,
croyances et pulsions,
toutes les diversités,
toutes les disparités.
Ces regards sont tous frères,
car tous d’une même terre.
Préface de Claude Luezior Éditions France Libris, juin 2021
Ceux qui rêvent éveillés ont connaissance
de mille choses qui échappent à ceux qui ne rêvent
qu’endormis. Edgar Allan Poe
Depuis l’origine du monde, l’arbre est le fidèle compagnon de la vie de l’homme. N’est-ce point sous un arbre, au jardin d’Eden, qu'Adam et Ève échangèrent leurs premières caresses? Du berceau au cercueil, l’arbre est présent. Trace conservée au plus profond de l’être, taillée dans notre histoire / et qui résonne au cœur de la nef végétale.
C’est pourquoi souvent, les images de la vie et du rêve se confondent. Tout comme Gounod, inspiré par Goethe dans la nuit des Walpurgis, l’auteure fascinée par les arbres perçoit, dans leur écorce tourmentée, les reclus du temps qui l’attirent, l’inquiètent. D’où cette trentaine de photos pour en garder la trace.
Hésitation des souvenances, jaillissement et métamorphoses du regard.
Les cernes du mirage brisent les barrières du visible pour retrouver le dialogue perdu avec tous ces êtres qui apparaissent devant Kathleen Hyden-David.
Étonnant ailleurs, inquiétants visages aux regards immobiles qui, impassibles, observent, épient dans leur tronc d’arbre pour seul refuge (page 20). Veulent-ils renaître, ou entraîner une proie ? Mais aller à l'envers du miroir est toujours dangereux car le dragon veille et les fantômes, resurgissant dans l’hésitation du devenir, transforment celui qui les voit : ils me rendent étrangères.
Leur écorce est le canevas de quelques âmes errantes, vouivre ou gorgone, c’est une chambre de mémoire qui fascine la poétesse.
Écorce, titre du livre, interroge. Le lecteur peut se demander pourquoi le singulier au lieu du pluriel : chacun aura sa réponse.
Lorsque les alvéoles des branches s’égouttent sur les ombres, l’auteure écoute, en conjurant les puissances d'un au-delà pour en retrouver les racines. Souvent, selon Cesbron, un arbre humanise mieux un paysage que ne le ferait l’homme ; il faut alors la justesse du regard et la précision du mot pour le démontrer, ce que fait très bien Hyden David.
Les photos sont toutes plus surprenantes les uns que les autres, accompagnées par des textes qui suggèrent le rêve : illusion de rétine / ou rêve secrété / du fond des siècles / troll ou fou du roi, raconte-t-il ses ancêtres ou quelque farces grotesques? L’esprit laisse faire le rêve et quelque dieu généreux / aurait-il mélangé à la sève / quelque gouttes / de génie ?
L’auteure, en créant une image, oriente l’imaginaire du lecteur. Comme le souligne Bachelard : créer une image, c’est vraiment donner à voir.
La forêt manifeste la permanence de la vie. En s'identifiant au monde végétal l’auteure nous fait échapper à notre condition matérielle, à notre individualité périssable. Mais la vie se nourrit d’interrogations sans réponses. Peut-être en trouverons-nous dans ce recueil ?
Dans cette forêt vit tout un peuple d'ombres, mais rien n'est vain aux racines du ciel. Hyden-David, en ouvrant la forêt au regard, a su retrouver quelques genèses sculptées.
Sur les routes forestières se blottit une vie entre deux mondes. Malgré la rouille des lichens, la sève est toujours jeune : c’est ce que le lecteur ressent en s’imprégnant des photos et en lisant les textes qui les accompagnent. Nous avons ici un dialogue entrent l’énergie cachée des éléments, entre la chair du végétal et la chair de l’homme.
Nous ne saurions terminer cette recension sans souligner l’élégante préface de Claude Luezior qui se glisse dans les failles du soir. Par un flux de l’esprit et une grande sensibilité, ses mots captent les rumeurs de la forêt et soulignent la richesse de ce recueil.
Nicole Hardouin
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à toutes celles qui ne respirent plus et que nous continuons à aimer
Des oiseaux brodés s’embrassent sur le couvre-lit lorsqu’elle apparaît.
Sa présence me transporte en Iran, près du bassin de la mosquée rose de Chiraz où les nymphes s’ouvrent et se referment en corolles odorantes.
Avec la grâce d’un battement d’ailes de colibri, un soupçon de lumière se pose sur ses paupières aux reflets céruléens.
Ses grands yeux fixent la patine d’un luth d’où s’échappe la danse du soleil.
Aussitôt, elle se met à chanter.
Sa voix est un souffle ardent comme la poussière rouge d’un vent de sable.
Me vient l’image d’un caravansérail : cette étape des routes caravanières reliant le golfe Persique et la Méditerranée, cette oasis où défilent chameaux chargés de soieries, d’épices avec femmes et hommes en quête de bruissements de palmes et du ruissellement de l’eau.
D’accords en arpèges, les rimes vont de l’ombre à la lumière. Sa voix cristalline brode la parure du ciel et, tel un papillon, rejoint le croissant de lune.
La lueur fauve des braises pousse un dernier soupir quand retentit un ghazel de Hafiz* :
« … Ô ma rose,
J’ai vu dans les plis de ta robe
le vent qui renverse,
et ce n’est pas sans raison… »
*Né à Chiraz (Iran) au quatorzième siècle, Hafiz est le plus grand poète lyrique persan.
Son œuvre tient en un recueil de divân (vers) qui comporte 500 ghazels (poèmes).
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Je ne sais pas qui tu es
Je ne sais pas ce que tu fais
Je ne sais pas d’où tu viens
En tout cas sûrement de loin
Je ne sais pas ta religion
Mais tous nous maudissons
Les guerres, où nous, êtres humains,
Martyrisons et massacrons les innocents
Ils pleurent et crient en vain
Insensibles, nous tuons même les enfants !
Je ne sais pas qui tu es
Je ne sais pas ce que tu fais
Je ne sais pas ce que tu veux
Mais si tu appelles à un cessez-le-feu
Même si je dois mourir quand je t’aurai aidé
De bon cœur je le ferai !
Amoureux de l'écriture, poésie, romans, théâtre, articles politiques et de réflexions... Amoureux encore de la beauté de tant de femmes, malgré l'âge qui avance, la santé qui décline, leurs sourires ensoleillent mes jours...