Traverse au jour, la nuit tendue aux châssis des fenêtres. Sur l’ombre, le mur est l’horizon de l’heure. L’hiver le dépouille. Le froid l’use. La ligne des pierres guide le temps où le silence convié y joint son poids.
Peu de lumière, quelques mots sans parole, des regards aux châssis d’insomnie.
La fenêtre cristallise. Le réel s’écoule informe sous la loupe du gel. Les allées s’indifférencient. Le sombre tamise la neige où, dos d’écorce, les bois coupés cabossent l’herbe.
Un glissement s’opère, telle une faille sur l’envers du temps : éveil à nos sens.
ne te fie pas au regard triste des macareux
dedans s’évase la conscience pleine
de l’enfiévrée gentiane bleue
et l’âme de la délicate silène
les courants d’air ascendants
et descendants prennent
nos corps contraints et ravis dans
les tréfonds que l’océan déchaîne
la falaise élevée que point que la mer
toujours rattrape dans l’effarement
des pierres vives sait le sauvage abîme
où l’on craint souvent la perte de soi
dans l’âme collective
au paysage dirigé de ton rêve je devine
qui ose l’écume une liberté hors du temps
on reste assis sur l’herbe
une steppe sauvage d’eaux entre nous
où s’ondoient paresseux
nos désirs et nos rêves
un air tel un souvenir nous envahit
et se dépose sur nos yeux
sa brume légère
fait trembler la lumière
on n’est pas seuls
même si le monde entier nous sépare
nous portons chacun
sur nos dos et nos bras
dans nos yeux et dans nos corps
nos êtres passés
que nous envoyons des fois
à notre place
tels les spectres beaux et blancs
les flèches les transpercent comme l’air
ils tournent tel un feu
et des fois ils ressemblent à la mort
fatigués nous nous allongeons dans l’herbe
avec tout ce qui nous appartient
l’air nous envahit les narines et les yeux
et coule sur nos corps tel un fluide opalescent
doucement ces spectres beaux et blancs
commencent à se couvrir de chair et de sang
dans un amalgame nouveau et tendre
on reste assis sur l’herbe
il y a rien qui nous sépare
seul le goût diffèrent de nos larmes
qui coulent avec douceur sur nos visages
comme jadis
l’huile précieuse sur la barbe d’Aaron
Ce matin, le rose délicat d’un Tiepolo a jailli sur la ramille d’un pommier.
Cette tendresse suffisait à mon bonheur quand un éclat vermillon est venu avec La Vénus endormie, tableau de Giorgio da Castelfranca, dit Giorgione, peintre vénitien de la Renaissance italienne.
Ce tableau, parfois considéré comme le premier nu intégral, a certainement été peint dans un boudoir pétri de volupté où se froissent dentelles et soies colorées.
Giorgione a bien compris que Titien, son brillant élève, serait bientôt le Maître incontesté de la couleur, peintre à l’écoute de cette mélodie secrète qui se dévêt petit à petit, touche après touche.
Pour peindre une telle Vénus, il a fallu rencontrer de belles dames qui, adossées aux coussins de velours pourpre, laissent au bord de leur tasse l’exquise empreinte d’un rouge à lèvres couleur de feu.
Aux lisières de ces saveurs inouïes, une femme nue s’est endormie.
Ebloui, Giorgione a capté les suaves couleurs ambre, safran et rouge vermillon.
Sa palette est devenue le levain qui se lève et s’épanouit sur un corps brûlant de désir.
Fusant vers des transparences violettes, les jaune de Naples, ocre jaune et terre de Sienne peuplent le corps de cette Vénus que Giorgione a voulu comme la Sérénissime alanguie sur la lagune.
Un fleuve de couleurs s’engouffre sur cette lumineuse mosaïque de chairs d’où rayonne le sublime jardin des délices.
Quand une vénitienne déplie sa corolle, un subtil poème prend l’universelle couleur de la beauté.
Le soleil rouge de la déesse Hathor veille sur le sommeil de Vénus.
Ton envol éphémère
Traverse l’obscur,
Grand oiseau blanc
Eclos de la blessure de ma nuit
Au coeur de l’imaginaire.
Reviens grand oiseau blanc,
Signe la musique secrète
Des nobles mots figés
Sur le fil de mes incertitudes.
Déploie tes ailes clairvoyantes,
Etire-les
A la rencontre de mon étoile rebelle,
Reviens me révéler
Le secret du verbe
Et ensemencer d’amour
Ma terre à l’aube naissante.
Je n'écrirai pas à ta place. Parce que je ne sais pas utiliser les mots aussi bien que toi. Lorsque moi je regarde la mer, je vois la mer. Toi, lorsque tu regardes la mer, des vagues de proses s'agitent dans ta tête et à la fin, je suis trempée d’émotions.
Je n'écrirai pas à ta place. Parce que je n'ai pas cette capacité à retourner le cœur des gens, retourner les mots dans tous les sens pour leur donner une nouvelle existence. Je ne sais pas les rendre sublimes ; je ne fais que les regarder, alors que toi, tu les réveilles pour nous montrer en eux toutes leurs beautés.
Tu fais des virgules, des respirations pour ceux qui étouffent. Tu fais des points, des racines pour ceux qui dans leurs souffrances, s’engouffrent.
Je n'écrirai pas à ta place, parce que je ne sais pas associer douceur et gravité : Tu sais parler de la mort sans jamais rendre ce sujet, lourd, d'une tristesse infinie ; tu le transformes, je suis la spectatrice, tu es la magicienne qui sort de son chapeau, les colombes de la poésie.
Je n'écrirai pas à ta place. Parce que tu n'as tout simplement besoin de personne pour écrire comme tu le fais. Ai confiance en toi, le monde a besoin de tes mots pour pouvoir enfin respirer.
Lola BERTHOME – ETUDIANTE – 17400 LA VERGNE PRIX DE LA PROSE POETIQUE 2022
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Amoureux de l'écriture, poésie, romans, théâtre, articles politiques et de réflexions... Amoureux encore de la beauté de tant de femmes, malgré l'âge qui avance, la santé qui décline, leurs sourires ensoleillent mes jours...