Un pigeon n’est pas seulement un oiseau
qui roucoule sur le toit des maisons
ou sur le bord d’un mur,
c’est aussi un gracieux messager
qui voyage entre deux volières
pour délivrer un courrier souvent essentiel
ou devenir lauréat d’un championnat
tout en essayant d’éviter les miroirs aux alouettes
parfois dressés sur son parcours.
Il n’a guère le loisir de bayer aux corneilles.
Pareil pour l’hirondelle
qui, en jouant son rôle habituel,
dépasse largement son statut
en annonçant le printemps.
Sans parler de la légendaire cigogne
à qui l’on attribuerait la livraison
de bébés à domicile.
Le monde entier est peut-être entouré de vautours,
par contre un nombre important d’autres volatiles
a toujours été présent à nos côtés
et fait le nécessaire
pour le rendre plus chouette !
L’humain
s’il était sage
l’humain
serait rebelle
et dirait aux chefs
qui ne sont tels
que parce qu’il le veut bien
« Allez tout seuls
faire les guerres
qui vous tentent
Avec votre corps
avec votre vie
avec votre mort »
Et il n’y aurait plus de guerre
que tout au plus quelques duels
Mais l’humain se soumet
aux chefs qui ne sont tels
que parce qu’il le veut bien
Et depuis des millénaires
la dictature et la guerre
perdurent de par le monde
* * * * * * * *
traductions de Béatrice Gaudy
L’uman
se fugues sage
l’uman
sirio recel
e dirait aû capa
que ne soun tau
qui percé o fou vous be
« Ana tou sou
fa la guerra
que vous tenten
Em votre cors
em votro vido
em votro mort »
soulamen quauquei duel
Ma l’uman se soumet
aû capa que ne soun tau
que percé o fou fou be
E dempuei dan milenâri
le ditaturo e lo guerre
perduren per lou mounde
Depuis l’ère des brumes ténébreuses,
La lumière créatrice est venue.
Des continents surgis des Abysses,
Dans l’âme et le cœur des hommes,
On a chanté les dieux, la nature
Créé le beau
Partagé des langages
Interrogé les consciences
Pensé avoir vaincu la misère,
Appris la solidarité, le partage
Honoré les beautés nouvelles de la vie
Vomi sur les horreurs de la guerre
Honni l’intolérance
Glorifié la connaissance
Depuis l’ère des brumes ténébreuses,
La lumière créatrice est venue.
On a réinventé les sciences
Pensé faire tomber les murs de l’indifférence
Eloigné l’heure du repos éternel,
Mais la folie des hommes est toujours là,
Vigilante, venin des cœurs,
L’intégrisme prospère
Soif d’Avoir, recherchée plus que d’Être.
Le Veau d’Or, toujours debout
Chasse la sérénité, l’espoir,
Fait de nouveaux esclaves
De nouveaux ravages
Depuis l’ère des brumes ténébreuses,
La lumière créatrice était venue,
Tout a été dit, ciselé,
Mis en couleurs, en musiques
Doit-on laisser l’archet, la plume,
La gouge, le ciseau, le pinceau ? Que reste-t-il à inventer,
A dessiner, à mettre sur portée,
Connaissances pour l’Autre
Richesses de la diversité,
Pour voir se lever l’Astre de Paix?
Orgueil, vanité que
Questions se poser ?
Résister, debout, est promesse d’avenir.
Jean-Marie Sourgens est journaliste, écrivain et poète
Il suffit
Qu’un visage inconnu s’entrouvre dans la rue
qu’un regard inconnu se jette dans mes yeux
qu’une bouche inconnue s’aiguise d’un sourire
qu’une voix inconnue se vête d’amitié
qu’une main inconnue serre ma main très fort
qu’un soleil inconnu darde sur moi ses dents
qu’une vague inconnue se risque sur mes plages
qu’une chair inconnue se prenne dans mes rêts
j’oublie ma solitude et ses portes murées
j’oublie que mon destin n’a pas d’identité
Je ne suis qu’un bourgeon sous la langue des sèves
gonflé d’azur et futur de sa fleur
qu’un cocon déchiré par un battement d’ailes.
Les cloisons de mon corps abattent en chantant
mon coeur fait le plongeon de la mort à la vie.
Jean-Marie Sourgens (in revue « Europe » )
Poème extrait de la belle anthologie de Pierre Seghers : « Le livre d’or de la poésie française contemporaine de H à Z (2e tome)
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Ils sont tous rassemblés
le long de la frontière.
Le ciel est bleu
le sol couvert de neige.
Ils attendent l’ordre d’attaquer
leurs frères, leurs amis innocents
Qui n’ont rien fait,
Seulement être situés
Où les autres voudraient être.
Lorsqu’ils auront atteint
ce rêve machiavélique,
lorsqu’ils seront au cœur de ce pays
dévasté, ruiné, anéanti,
ils feront régner la terreur comme toujours
ils reconstruiront sur les ruines fumantes
en marchant sur les cadavres
sur cette terre gorgée de sang
et sans aucun remord
ils fêteront ce qu’ils appelleront
une victoire !
Pierre GUÉRANDE-Baronnies de l'imaginaire-Poèmes- Editions Saint-Honoré-Paris
ISBN:978-2-407-01519-1
C'est un réel voyage que cette plongée dans les ''Baronnies de l'imaginaire'' de Pierre Guérande ! Un voyage au présent qui respecte certains mots du passé tel que ''baronnie'' ; un beau voyage dans ce territoire de langue française que servent si bien les poètes belges dont les illustres pères se nomment Émile Verhaeren, Maurice Carême, Charles Van Lerberghe, Théodore Hannon et tant d'autres...
Tel un chevalier, Pierre Guérande entame un voyage qui défie les lieux et le temps pour dédier, à la moindre émotion, quelques mots de neuve poésie à tel ou tel ami qui l'aura touché par sa qualité de peintre, musicien, poète ou autre créateur. Voilà les ''Baronnies de l'imaginaire''', ces terres spirituelles qui ont un lien d'appartenance ancienne, et qui continuent à flamboyer du blason ; des domaines où se rencontrent des âmes qui ont une fleur à offrir au monde.
Il s'agit d'une sensibilité qui sait choisir les termes anciens et les offrir au présent tels ''le grandiose inachèvement/ des écoinçons et des bretèches dont nous parle un peintre ''en sa palette fatiguée/ des symétries de convenance («Le chevalet d'écume»-Page 12)
Ce recueil en son entier est un trésor. Chacun peut y trouver un bijou taillé de multiples facettes à admirer, à conserver en souvenir d'une rencontre rare.
Qui ne saurait se laisser envoûter par ces textes précis au riche vocabulaire, écrits en lumière de vérité, sans langage ostentatoire, mais que l'on garde en mémoire.
Personnellement, en tant que peintre, je choisirais le magistral portrait du héron !
Pierre Guérande semble dresser ici, une sorte de portait du poète, dans sa silencieuse noblesse, hors des fatuités bruyantes dispensées par certains concours ou académies.
''Il tient de l'armure et du prince /un fuselage séculaire/ gris-perle savamment lissé/ apesanteur et gravité...Sentinelle des fraîches eaux /bleu samouraï des roselières/ il se défait de son ego/ pour n'incarner que son lignage...Il réinvente l'immobilité/ entre deux glissements muets/ vers un ailleurs d'enivrement/ et de solitude héraldique...Il vole un temps à hauteur d'homme.''.. (« Sphinx ou héron »-Pages 14-15)
Reconnaissons à Pierre Guérande, l'acuité du regard, la profondeur des idées, la richesse des images et la sobre beauté du vocabulaire ; ces qualités qui, ajoutées à l'élégante discrétion, font la noblesse et ''le lignage'' d'un poète.
Le mensonge à la bouche
Par l’acier, le feu
Ils sont entrés.
Et du chaos naît le vide.
Le vide
Voleur d’espoir
Voleur de liberté
Le vide cette tombe
Eteignant tous regards.
Paupières
De neige
Une fêlure
Pour lumière.
Dans la brèche
Et sans haine
Cernée, blême,
La poussière
Pour larmes.
Le temps fait lieux
Là où vont nos pas
La terre est nôtre
Et de traces en sillons
Se creuse le voyage
S’engrange la distance
Ici s’éloigne le pays
Ici s’avive la chair
L’enfance s’y tient
Frêle et sans âge.
Partir, fort des vies
Que l’on protège
Mais revenir
Poings serrés.
Regards sur Monde
Face au vide qui miaule
Le chœur tragique des vivants.
Dans nos veines
L impossible attente.
Et la main qui se tend
Sur l’air telle une peau
Défend sa terre
Dénonce le fou
Refuse son joug
Nie la mort
Ici, tenir fait loi.
Chair contre acier
Résiste un peuple
Mères et enfants, vieillards
Hommes et femmes VIVANTS.
Il avait dans les yeux
Tous les feux merveilleux
De la lumière des cieux,
Il avait dans les mains
Toutes les lignes du chemin
Elevant jusqu’au divin.
Etait-ce bien un homme,
Etait-ce bien un ange,
Nul ne le savait,
Seul un rossignol le nomme
Tant sa beauté l’étonne.
Il allait en silence
De nuage en nuage
Effeuillant d’un geste lent
Les lys de la tempérance,
Effaçant par compassion
Ce que ce monde perdu
Porte de plus terrifiant.
Etait-ce bien un homme,
Etait-ce bien un ange,
Nul ne le savait,
Trop de sang lui coulait sur les mains.
Amoureux de l'écriture, poésie, romans, théâtre, articles politiques et de réflexions... Amoureux encore de la beauté de tant de femmes, malgré l'âge qui avance, la santé qui décline, leurs sourires ensoleillent mes jours...