N’aie pas peur, beau cerf aux abois,
Je ne suis pas de ces vilains chasseurs
Cruels, assoiffés de sang, traqueurs
Qui t’acculeraient au fond des bois.
Regarde- moi, qui suis perdue ce soir
Et guide moi dans le soleil couchant
Vers la clairière où s’entendra le chant
Du ruisseau où sans peur tu iras boire.
Non, mon ami le cerf, n’aie pas peur !
S’il vous donne parfois l’impression de l’avoir perdue,
une autre au timbre légèrement différent
reprend presque aussitôt son souffle
là où l’avait laissé la précédente
jusqu’à ce qu’une autre encore
accepte d’assurer la relève.
Aurait-il pour autant hérité d’une chorale intérieure ?
A vrai dire, il n’en sait rien,
mais ce dont il a acquis la certitude,
c’est que, si celle-ci existait vraiment,
il devrait constamment la réinventer.
Les cloches déroulent des sons ovoïdes
Grappes de Pâques en toutes saisons
où persiste l'enfance
L'appel aux heures du jour
Ma secrète réponse : je Te sais
et Ta pleine présence au cœur de la ville
Si je pouvais prendre dans les mains
un morceau d’argile, le casser, le pétrir,
te donner un visage comme je te sens,
saurais-je réunir miette par miette que tu sois
aussi entier et fort que la terre d’où tu viens,
tumultueux et doux comme la mer,
orageux tel le vent sur les sommets des montagnes,
tendre et pur comme les neiges immaculées,
limpide et froid pareil à l’eau des fjords scandinaves,
infini comme la Mer Egée,
lumineux et rapide tel l’éclair,
brillant comme le lever du soleil sur les vagues,
parfumé tel un champ fleuri,
fructueux comme un verger de pommiers,
si je pouvais faire un corps de mes paumes,
saurais-je le modeler pour charmer le monde
tout autour telle la lyre d’Orphée,
enchanter l’oeil comme autrefois les dieux grecs,
mais je ne suis pas le potier merveilleux
qui fait chanter et danser l’argile dans ses mains,
je ne suis qu’un morceau d’argile,
brisé et refait par ton chant,
je peux te reconnaître, mais je ne peux
te donner ni corps, ni visage,
tu es la mer qui à tout instant fait frémir ses eaux,
troubles ou limpides comme le ciel,
métallique, sombre, de l’argent fondu,
orange, transparente, bleuâtre, turquoise,
jusqu'à ce qu’elle s’éclaircisse dans le cristal bleu et se taise.
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* * *
Infinito come il mare
Se io potessi prendere tra le mani
un pezzo di argilla, romperlo, impastarlo,
plasmarti una faccia come ti percepisco,
saprei ricostruirti, briciola per briciola, per renderti
integro e forte come la terra da cui provieni,
turbolento e dolce come il mare,
tempestoso come il vento sulle cime delle montagne,
tenero e puro come le nevi immacolate,
limpido e freddo come l'acqua dei fiordi scandinavi,
infinito come il Mar Egeo,
luminoso e veloce come un fulmine,
brillante come l'alba sulle onde,
profumato come un campo in fiore,
fecondo come un frutteto di meli,
se potessi fare un corpo con i miei palmi,
potrei modellarlo per affascinare il mondo
tutto intorno come la lira di Orfeo,
incantare l'occhio come un tempo le divinità greche,
ma non sono il meraviglioso vasaio
che fa cantare e danzare l'argilla tra le mani,
sono solo un pezzo d’argilla,
rotto e rifatto dal tuo canto,
posso riconoscerti, ma non posso
donarti né un corpo né un volto,
sei il mare che da un momento all'altro fa fremere le acque,
torbide o limpide come il cielo,
metallico, scuro, di argento fuso,
arancione, trasparente, bluastro, turchese,
finché non si schiarisce nel cristallino blu e tace.
Une info, à mon sens importante pour toutes celles et ceux qui aiment les sculptures et les poèmes d’Etienne Fatras que j’ai la joie de publier régulièrement sur Couleurs Poésies :
Suite au don d'une sculpture à l'opéra de Reims pour l'anniversaire des 150 ans, FR3 est venu visiter l’atelier d’Etienne. Cette visite sera présentée dans l'émission "Culture et vous" de FR3 grand Est le lundi 5 juin à 18 h 30.
La vie est faite d’une multitude d’événements lorsqu’on atteint l’âge qui est le mien. Je ne m’attendais pas au cadeau qui m’a été fait il y a quelques semaines. Grâce à mon ami Gérard Gautier, poète de Saint-Brieuc, qui a proposé ma candidature à l’association dont il est membre, on m’a fait « ambassadeur de la paix », parce que j’accueille des poètes de tout pays, de toute culture, femmes et homme depuis plus de dix ans.
Je ne savais pas pour cette candidature, je l’ai découvert par un e-mail. J’étais tellement abasourdi que j’ai d’abord cru à une arnaque. Mais Gérard m’a confirmé que c’était très sérieux !
C’est une joie immense pour moi, inattendue, mais c’est aussi une fierté en cette époque où l’Europe est à nouveau victime d’une guerre barbare en Ukraine, mais encore en ce temps, ne serait-ce qu’en France, de sauvagerie abjecte liée aux trafics de drogue, à l’horreur des machos qui se sont persuadés que leur femme, voire les femmes en général, sont leurs objets de plaisir et rien d’autre !
Le titre est uniquement honorifique, mais je ne pouvais pas en recevoir un plus beau ! Merci cher Gérard, merci à l’association !!
« Moments de vie »
te souviens-tu
combien, soudain
la terre s’est ouverte
sous tes pieds ?
elle venait d’avouer
qu’elle en aimait
un autre
qu’à ses yeux
tu ne valais
plus grand chose…
te souvient-il
de ce jour
de profonde détresse
lorsque ton patron
te jeta à la porte
affirmant
que tu ne valais
plus grand chose
et des décennies plus tôt
après l’échec
à ton premier examen
juste après la mort
de cette grand-mère
cadeau du ciel ?
comment aurais-tu
réussi à croire
encore en toi ?
souviens-toi
du temps qui passe
et que
quoi qu’on dise
l’échec peut arriver
à tout moment
sans que tu n’y puisses rien…
c’est facile et commode
de montrer l’autre du doigt
de le faire passer
pour un cancre
aux mains toujours
bleuies par l’encre
mais ceux qui te jugent
et qui te condamnent
n’ont pas été abîmés
par les sorts du hasard
beaucoup souffriront plus tard
rien ne les a préparé
aux épreuves
que la vie, toujours,
nous jette en plein face !
on a beau implorer le ciel
il reste sourd et muet
pour les petites choses
comme pour les drames
nous sommes seuls et le restons
à chacun de choisir
rester debout
ou courber l’échine
et si tu l’inclines
nul n’a la droit de se moquer
il ignore ce que demain
lui réserve
d’un simple tour de main
S’il me fallait repartir
à zéro pour tout reprendre
dans le sable et sur la cendre
s’il fallait tout rebâtir
s’il me fallait rejaillir
de la source sans comprendre
effacés sans se défendre
connaissance et souvenirs
je ferais bien grise mine
j’an ai gros sur la poitrine
à l’idée de tout avoir
à refaire mais savoir
au moment de rendre l’âme
j’aimerais être une femme
Nouveau recueil de Claude Luezior aux Editions Librairie-Galerie Racine.
Un titre énigmatique qui semble nous inviter à mener un tri avec le poète.
Les titres alternent entre clair et obscur :
Rêve / Cauchemar
Rimailles et rossignols / Occulte
Lueur / Sacrifice
Pour une seule violette / Suffit
Mais bien sûr le monde n’est pas si manichéen et s’il faut trier il faut aussi tresser ce qui semble pourtant irréconciliable.
Le poète interroge l’essence même des mots, leur pouvoir qui semble bien illusoire, et le rôle de la poésie dans un monde qui ne lui laisse guère de place :
« Porteurs d’inachevé en rupture avec leurs semblables, les poètes sont-ils ces êtres désignés qui tentent désespérément de traduire une langue rescapée du bannissement et que nous aurions heurtée d’un inconscient originel ? »
Et c’est une folle et douloureuse entreprise que d’avoir à nommer :
« Là-bas se déhanche un poème »
« Dans le mystère de la nuit presque invisible
Rougeoient les scories de nos silences »
Entre douleurs et enthousiasmes, Claude Luezior nous entraîne sur les chemins de ses interrogations de poète, de ses craintes d’homme :
« Perdre l’heure
Quand l’horloge vous est comptée »
Sans que jamais la lumière cependant ne tienne le rôle de figurante.
Les derniers titres :
Printemps / Fiat Lux / Premiers rayons / Aube / Pulpe
ont à mon sens valeur de victoire.
Une victoire sobre .
A hauteur d’homme et de poète.
Mais avec des mots de haute volée.
« Manne pour les fiançailles où jubilent des persiennes ouvertes ».
Il aura beau dire , l’aurore non seulement est à la portée de Claude Luezior, mais le souffle de beauté que ses poèmes distillent nous laisse longtemps dans un fantasme d’été perpétuel .
Que l’on a envie de peigner longtemps dans le sens du poil.
Amoureux de l'écriture, poésie, romans, théâtre, articles politiques et de réflexions... Amoureux encore de la beauté de tant de femmes, malgré l'âge qui avance, la santé qui décline, leurs sourires ensoleillent mes jours...