Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
3 octobre 2020 6 03 /10 /octobre /2020 06:31
Éditions l’Harmattan, Paris, octobre 2019

                     Les portes du dire s’entrouvrent sur  une évocation discrète, pudique de la vie : Parmi des herbes, des bleuets et des pavots / les caresses de l’été dans la plaine brûlante, hymne panthéiste à la nature : des nénuphars fleurissent dans mes cheveux. Au-delà du silence pulse une présence lointaine, évanescente mais tellement présente, qui se tient au bord des falaises vertigineuses de l’absence : il nous reste la rupture, l’immobilité, la douleur / il nous reste le silence.

Appuyée sur une digue de feu, la Poétesse, Orante d’une liturgie, laisse ses pas s’éloigner : nous sommes les cicatrices. Les mots en fusion, sang du vent, cantiques d’éclairs, tressent des fruits de haute mer, ils s’enroulent, épines et pétales : les paroles  cherchent leur chemin jusqu’à nous.

Mots équinoxes, secrets, mordants, traces, les ombres au goût de sel se mêlent, s’entrecroisent dans les levers d’aube silencieux et les frimas de la nuit alors que le sang flagelle encore le corps : je flâne sans cesse égarée / sur le chemin d’hier.

Les élans silencieux de Sonia Elvireanu , il faut les humer, caresser leurs encolures. Ils tissent l’absence : Je t’ai cherché, tu n’étais nulle part. La mélancolie va l’amble avec son cortège de houles et de retraits, de regrets et de tempêtes : je suis une ronce dans la plaine. Interstices dans le silence : le lever et le coucher du soleil / se brisent dans mes mains vides.

Les mots–larmes, derrière les paupières, partent sur les rives de la solitude,  présence du dire, force du manque, il faut toujours se baisser pour passer les écluses qui se déversent dans les estuaires nocturnes : cette nuit, je cherche un abri.

Malgré la grisaille du silence, de l’absence, ce recueil est un verre de lumière à boire à petites gorgées, ce sont des images sur la peau des plantes, des ébauches de roulis et d’écume qui viennent mourir sur  l’aube, ce sont des vagues intérieures. Torrentueuses, elles ont le parfum de l’aimé si lointain et pourtant si proche : et par-dessus le monde / Ton sourire.

La Poétesse, grande véneuse, lâche ses chiens, la vie est aux abois. Le grand cerf ne meurt qu’une fois dans la forêt des souvenirs  : saignement du vivant.

Oratorio de fugues pour des lèvres en bréviaire qui psalmodient de secrètes oraisons : une croix allumée dans la main.

Les phrases passent entre les ronces pour ne retenir que le pollen déposé par l’abeille qui a butiné. Le désir est toujours là, pudique, il tenaille les mots pour se perdre dans le souffle du ciel, la vie se nourrit d’interrogations, d’attende.

L’auteur, à l’image de Jean Orizet, est pèlerin de l’indicible, témoin de l’ineffable.

Avec ardeur les pulpes sont fécondées, les sucs du regret se transmuent. Germent  les élans, subtile et discrète prière, nuages vers l’au-delà,  vers la Transcendance. En effet, ce recueil pourrait-être un livre d’heures que l’on tient avec recueillement, c’est une prière intime celle que l’on murmure dans les fentes et les cicatrices du cɶur, dans les pulsations d’aubes noires. Ce sont parfois des psaumes que retiennent les nuages, avant de se mêler à la musique des sphères dont l’auteur conserve les accords au plus profond de son âme : Dieu donne de la sérénité / à ma pensée / pour que sa limpidité / ne tombe / nulle part en chemin.

Sonia Elvireanu nous livre discrètement sa respiration. En la partageant, le lecteur chevauche l’océan, mange les étoiles, les vagues, les fleurs, se brûle aux éclats d’un soleil noir, s’éclaire aux ténèbres, retient le début et la fin du cri de l’oiselle.

Dans le précaire équilibre du crépuscule, entre sève, braises et songes les ombres sanguinaires descendent l’escalier des impatiences, offrandes pour les âmes perdues.

C’est l’heure où la lumière est à deux pas de l’Invisible. Comme Bonnefoy, l’auteur charge ses rêves dans la barque. Pour quel voyage ?

 C’est un feu de brousse, une flamme vêtue de bure, une braise dans la cendre, la brûlure du soir sur la sinuosité des souvenirs. Les ombres ne repartent jamais seules et Sonia Elvireanu le sait. Lorsque le manque érode l’écho gémissant, l’auteur le ramène au gîte dans une brûlante et discrète andante qui enserre l’espace balayé par le lin de tous les vents.

Mais que sont les souvenirs devenus ? Ils caressent et mordent : rencontrent-ils  leurs corps ? 

Dualité du manque, à travers les branches d’olivier : la seule voie vers toi : l’amour.

Superbe recueil, à lire comme un livre d’heures, prière à réciter pour que nous soyons vivants tels le pain et les poissons / offerts par Jésus aux Siens, alors, demain, peut-être / mon heure fleurira / au bord de la vie assoiffée de toi.

L’auteur, paumes offertes à l’Invisible, recueille un souffle de ciel, un souffle d’amour.

 

Nicole Hardouin                           

Partager cet article
Repost0
2 octobre 2020 5 02 /10 /octobre /2020 06:38
Photo : titelouveblanche.skyrock.com

 

 
 
Tu cours après l'amour
Comme la louve après le lièvre
Au cœur de la sombre forêt.
 
Tu sens son odeur qui t'appelle
Et sans jamais le rattraper
Tu t'essouffles, tu en perds haleine
Orgueil, force et volonté.
 
Ton cœur sous la fourrure grise
Martèle, se rebiffe, s'épuise
À te faire entendre la vérité
L'amour n'est pas un gibier
C'est au cœur de l'âme qu'il se puise
Pas dans les sombres forêts.
 
© Leafar Izen
 
Texte extrait de « Souvenirs du Néant »

 
 
 
 

Voir en fin de page d'accueil du blog, la protection des droits
Partager cet article
Repost0
1 octobre 2020 4 01 /10 /octobre /2020 03:30
Image parisbreizhmedia.fr

 

 

 
Y a-t-il un médecin dans la salle ?
La crise sanitaire
S’incruste dans les pierres
Où germent les fantasmes
De l’homme tétanisé.
 
Il laisse échapper
Les vibrations d’espérance
Au gré du vent
Et remplit son espace
D’une vague mélancolique
Porteuse d’angoisse
Et de froideur obscure.

©Eliane Hurtado
 
 
 
 
 

Voir en fin de page d'accueil du blog, la protection des droits
Partager cet article
Repost0
30 septembre 2020 3 30 /09 /septembre /2020 06:34
 
                                                                                 à Paul Mathieu
 
 
I. Le marcheur - vers l'avant
 
Regarde cet homme là-bas,
Il marche
Devant lui,
Est-ce le marcheur de Giacometti ?
Il marche du lever du jour au coucher et
La nuit venue, il s'allonge sur terre
Se sachant de glaise et terrien, mais
Pour quel destin ? Le destin de mortel ?
Ou est-ce seulement de refus et ange
N'étant plus
Et ne voulant du « dasein »
De jour comme de nuit ?
(Lève-toi et marche
Dit pourtant la prophétie
Au marcheur de Giacometti!)
Et pourtant je marche mais
N'est-ce pas vers la nuit ?
Car tu es l'ange déchu, lui répond
La voix venue de plus loin que lui,
La voix de la prophétie
 
II. La pomme y est
 
Nous marchons sans heurts
Vers le bois, l'arbre est là
Avant nous, il nous a précédés,
Nous a préparé la terre alors
Que nous étions dans une oasis
Quelque part ; l'arbre est notre
Ami, mais nous ne descendons
Pas de lui, par contre la pomme,
Oui, et de fruits et de connaissance
(Mange dit une voix de plus bas ;
Celle qui sait la condition)...
 
©MILOUD KEDDAR
 
 « Une pomme d'ombre » est le titre d'un livre
de Paul Mathieu auquel j'ai par le passé consacré
une chronique qui fit l'objet d'une parution sur
le site de la revue belge TRAVERSÉES
Paul Mathieu est un écrivain belge, membre de
l'Académie Luxembourgeoise 
 
 
 
 
Voir en fin de page d'accueil du blog, la protection des droits
Partager cet article
Repost0
29 septembre 2020 2 29 /09 /septembre /2020 06:29

 

 
 
 
J'ai la griffe du dragon
Au regard d'argent
Elle m'écorche vive
M'entraine à la dérive
On l'a appelé par ce chant
Endormi dans le temps,
Il me soulève vers le vent et
Ma peau éclate en sang,
Il est venu en quête
De pureté parfaire,
Et j'ai levé les yeux
Avec ce chant vers les cieux,
Je suis écorchée vive
Plongée dans son regard d'argent,
Je ne cherche pas à survivre
Malgré son feu brûlant.

©Djida Cherfi 
20/06/2020
 
 

Voir en fin de page d'accueil du blog, la protection des droits
Partager cet article
Repost0
28 septembre 2020 1 28 /09 /septembre /2020 06:15
La plénitude, sculpture d’Etienne Fatras ©

 

 

 

Je me souviens des pleins et des déliés,

Tirant la langue sous l'effort,

La plume sergent major,

Trempée dans l'encrier.

 

Loin des canons de beauté actuel,

Pétris d'anorexiques élégances,

Il en est d'autres plus sensuels

Comme des cornes d'abondance.

 

Quand la maternité atteint sa plénitude

Et que l'enfant est dans son nid,

Le corps est dans sa béatitude

Et le visage serein, souris.

 

Les déliés ne sont là

Que pour mettre en valeur les pleins,

Prenez une ligne et suivez-la,

Vous verrez elle n'a pas de fin.

 

©Etienne Fatras

 

 

 

Voir en fin de page d'accueil du blog, la protection des droits

Partager cet article
Repost0
27 septembre 2020 7 27 /09 /septembre /2020 06:29
Le poète et son épouse à Rome

 

 
 
Rome antique, éternelle, envoûtante…
À force d’entendre dire aux quatre coins du monde
que tous les chemins mènent à Rome,
elle et moi étions si impatients
de nous retrouver au plus vite là-bas.
 
Là-bas,
un de ces lieux tellement rares où il fait bon vivre
et où les conditions idéales sont réunies
pour que l’amour sache user de son empire
sans pour autant vendre son âme
ou exiger la moindre compensation en retour.
 
Là-bas,
où, rien que pour nous,
chante une fontaine de jouvence,
et où la baignade est pourtant interdite
aux communs des mortels.
 
Là-bas,
où frétillent mille sources entourées de mousse
officiellement placées sous la haute protection
de Neptune, ses chevaux, ses tritons,
et qui, malgré un afflux
à tel point permanent de visiteurs étrangers
que l’on pourrait facilement y perdre son latin,
occupera toujours une place de choix
parmi nos souvenirs les plus romantiques.
 
©Michel Duprez
 
 
 
 
 
Voir en fin de page d'accueil du blog, la protection des droits
Partager cet article
Repost0
26 septembre 2020 6 26 /09 /septembre /2020 06:27
Proposition de Voyage Poétique sous la Voûte Etoilée, de et proposé par Laura Rucinska
 
Si vous en avez la possibilité, le 3 octobre, ne manquez pas ce voyage en monde Poétique, ce monde méconnu à notre époque, ce monde qui ne bénéficie d’aucun effort de la part des Média... (Jean Dornac)
 

 

Partager cet article
Repost0
25 septembre 2020 5 25 /09 /septembre /2020 06:53
Photo : versaversa.tumblr.com
 
 
 
 
 
Regarde à l’intérieur de toi
C’est vide
C’est plein
Cela dépend des jours
Qui ne sont plus
Qui ne sont pas encore
Succession des cycles
Roue du Dharma alternant
Ce qui meurt
Ce qui renait
Car rien ne tient debout
Dans ce monde flottant
Ni vie
Ni mort
Simplement le passage
De l’une à l’autre
Comme le cours de la rivière
Se jetant dans la mer
Comme le pollen des fleurs mortes
Ensemençant le printemps
Regarde à l’intérieur de toi
Et tu verras le monde tel qu’il est
Ni bon
Ni mauvais
Flux de conscience
Sans commencement ni fin
Formant ainsi la spirale
Du devenir
Qui s’étend à l’infini
Là où les étoiles n’ont pas encore jailli
Là où la mort frappe celui
Qui n’est pas encore né.
 
©Pascal Hérault
 
 
 

 
Voir en fin de page d'accueil du blog, la protection des droits
Partager cet article
Repost0
24 septembre 2020 4 24 /09 /septembre /2020 06:18
Photo : podcast.ausha.co/j

 

 
 
 
parfois j’ai envie de poésie,
comme si je n’écrivais pas de poésie,
 
j’ai l’impression d’être à l’attente
du mystère qu’elle porte en soi,
avec son pouvoir de te prendre aux tréfonds,
pour te faire sentir la vie,
 
mais en tant de visages,
s’émerveillant de ses mots,
de ton image en miroir
lorsque tu te rencontres avec toi et le monde,
 
il te semble que c’est alors que tu vis,
 
dans ce jeu fascinant de paroles
qui roulent sans cesse le monde
et toi en même temps,
et tous les mondes qui ont existé et existeront,
 
comme un vieux chant venu de très loin
ou de tout près qu’il te semble
te reconnaître comme dans un miroir
ou peut-être ne serait-ce pas toi,
 
parfois j’ai envie de poésie,
comme si je n’avais jamais écrit un seul vers,
 
je me cherche à travers elle,
comme on cherchait
l’eau miraculeuse
de la guérison,
 
avec chaque mot vient vers moi
le murmure d’un secret à peine perceptible
et l’étrange certitude que je suis autre chose,
et ceux que j’aime, j’aimerais alors leur dire :
 
- Arrêtez-vous un instant de ce que vous faites,
écoutez le susurrement de mon eau,
buvez-en avec moi,
 
laissez guérir toutes vos blessures
et attachez à vous l’arc-en-ciel comme une ceinture
qui relie au ciel cette argile miraculeuse,
 
n’épuisez plus votre corps qui sent la douleur,
le plaisir, toutes les tentations,
à le connaître vous pouvez le comprendre,
 
vous aimerez  la lumière,
vous serez à même de l’élever en vous,
 
l’eau de la guérison coule en chacun,
et l’envie d’être la poésie même,
 
parfois j’ai envie de poésie,
comme si je n’écrivais pas de poésie,
 
c’est alors que je commence à sentir la vie,
être le poème que j’écris.
 
©Sonia Elvireanu
1.09.2020
 
 
 
 
 
Voir en fin de page d'accueil du blog, la protection des droits
Partager cet article
Repost0

Présentation

  • : Couleurs Poésies 2
  • : Ce blog est dédié à la poésie actuelle, aux poètes connus ou inconnus et vivants.
  • Contact

  • jdor
  • Amoureux de l'écriture, poésie, romans, théâtre, articles politiques et de réflexions... Amoureux encore de la beauté de tant de femmes, malgré l'âge qui avance, la santé qui décline, leurs sourires ensoleillent mes jours...
  • Amoureux de l'écriture, poésie, romans, théâtre, articles politiques et de réflexions... Amoureux encore de la beauté de tant de femmes, malgré l'âge qui avance, la santé qui décline, leurs sourires ensoleillent mes jours...

Recherche