© Christophe Dune / flickr
J’en ai connues de ces vieilles demoiselles
Le cou toujours barré d’un trait de velours noir
Dans leurs mains de mitaines reposait un missel
Au fond de leurs yeux pâles la ligne bleue des Vosges avait perdu l’espoir.
Leurs jupes étaient trop longues leurs cheveux trop tirés
Elles hantaient les églises ignoraient les cafés
En perpétuels deuils d’éternels fiancés
Sur leurs lèvres trop fines la couleur des baisers s’était évaporée.
Au fond d’une armoire pendait encore jaunie
Une robe rose ou blanche un bout de ruban bleu
La robe d’un dimanche où elles avaient dit oui
Où le ciel était clair et l’avenir radieux.
Mais il y avait eu l’Alsace et la Lorraine
Honneur, devoir, patrie
Depuis tout petits on leur avait appris.
Et ils étaient partis et elles étaient restées
Enseveli l’amour dans la boue des tranchées
Et leurs larmes taries à force de couler
Jamais ne ressuscitèrent les roses d’un été.
Oui, j’en ai connues des vieilles demoiselles
Survivantes muettes d’un monde sans espoir
Les jeunes que nous étions parfois se moquaient d’elles
Plus tard nous l’avons su vous étiez notre mémoire.
© Annie Mullenbach- Nigay
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