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22 juillet 2022 5 22 /07 /juillet /2022 06:28

TABLEAUX D'UNE EXPOSITION, poésies et proses de JEANNE CHAMPEL GRENIER, éditions France Libris, 82 p., 2022, quadrichromie, préface de Michel Lagrange

 

 Non, ce n'est pas l'essai ripoliné d'un historien de l'art qui distille ses références et qui, à bout de souffle, se laisse déborder par un élan poétique. D'emblée, on sent chez Jeanne Champel Grenier (appelons-la Jeanne, à l'instar de son préfacier Michel Lagrange) une complicité avec les grands maîtres et ces 35 toiles ici reproduites en un miroir de bon aloi. L'écrivain s'adresse à Mona Lisa :


Tu nous suis du regard, immortelle présence
Signée Léonardo qui t'a sans doute aimée...


Poésie verticale ou prose, qu'importe, si le verbe est beau! Continuum d'émerveillements, d'étoiles, de berceuses, de caresses pour des peintures aimées et qui ont façonné son existence. Superbes expressions. Jeanne rebaptise les œuvres pour ses propres textes : ainsi, La sieste de Van Gogh devient La moisson :


Ce grand champ de la vie
perforé de grillons (...)


 Ou bien, à propos des Nymphéas de Monet :


Ici le ciel est tombé tout entier dans le Grand Bassin bordé d'ajoncs et ce n'est que surprises, tapis de soie fleurie flottant à fleur de nuages qui s'étirent, deviennent transparents et s'évanouissent.


Quelques mots, parfois tout simples, pour tout dire :


Il s'appelait Dali, Gala était son miel


Ou cette magistrale citation de Picasso, en 4e de couverture, sur fond noir, et qui prend toute la place :


Au fond, je crois que je suis un poète qui a mal tourné.


Tendresse et passion de Jeanne, dont on sait les dons en écriture et en peinture. Verbes et pinceaux semblent être pour elle une nature seconde : ce périple, empruntant son titre à Moussorgski, s'imprègne de ce monde, poussière de couleurs, que ne cessent de révéler poètes et artistes; mais aussi contre-jour d'une certaine inquiétude, d'ombres fertiles dévorées par la lumière.


Et aussitôt, la chaleur solaire de la poétesse plaide pour une sarabande nouvelle, celle des Coquelicots (...), derviches miniatures :


Leur flamme doit courir
Et danser, c'est un jeu
Mieux vaut brûler pour eux
Et ne pas les cueillir...


Ainsi firent Monet, Renoir ou Morisot
Qui pour les emporter en firent des tableaux :


Toute une éternité dansant le Flamenco !


On retrouve par ailleurs la profondeur humaine de l'écrivain dans son texte qu'elle intitule Maria enneigée de vivre, face à une affiche d'exposition concernant Eva Muder, par Edvard Munch (dont une majorité de gens ne connaissent que son Cri) :


J'eus envie de la prendre contre moi
de la serrer dans mes bras
de la réchauffer un peu
et de retenir son nom...
Maria, elle s'appelait
C'était un peu ma mère
d'une autre vie
ou bien moi
au seuil de ma nuit


Heureux traits de plume pour les gestes d'artistes majeurs : Chagall, Matisse et Bonnard vibrent sur la page.

 

©Claude Luezior  
 
 
 
 
 

 

 

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commentaires

A
Très belle recension pour un livre comme une promenade silencieuse dans la beauté...
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