20 mai 2022
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Se souviendra-t-on longtemps de nos excellents présentateurs de l’actualité littéraire qui, en radio comme en TV, nous sont connus depuis, pratiquement, la naissance du petit écran ?
On applaudissait à raison un Bernard Pivot pour Apostrophes, Lecture pour tous et même sa redoutable dictée, avant qu’il ne rejoigne le jury du Goncourt ; coups de cœur aussi pour Jacques Chancel avec Radioscopie (France Inter) et Le Grand Echiquier ; sur nos ondes radio, on se rappellera l’inimitable Armand Bachelier pour ses chroniques parisiennes. On fait désormais la fête à François Busnel pour La Grande Libraire, mais on est tout aussi réceptif à l’émission radio d’Emmanuel Khérad pour La Librairie francophone qui réunit les voix d’auteurs et de libraires français, canadiens, suisses, africains francophones et … belges !
Est-ce à dire que ces animateurs du meilleur cru garderont fort longtemps leur présente ou ancienne notoriété, on peut en douter en constatant le relatif oubli où s’enlisent certains noms de qualité, et l’on pense forcément à Max-Pol Fouchet qui cumulait les profils – tous remarquables – d’auteur, de présentateur TV en son âge héroïque, d’ethnologue et surtout d’humaniste et de résistant pour la liberté.
Ce palmarès flatteur n’autorise-t-il pas d’en évoquer le détenteur, alors que sa disparition remonte maintenant à quarante années, et que ses attitudes politiques – qui n’apparurent que dans ses pamphlets à pointe à peine émoussée, jamais dans un mandat – appellent à un salut rétrospectif sans demi-mesure ?
Un père qui fut un saint laïc
Max-Pol était le fils d’un incroyant, Paul-Hubert Fouchet, qui avait foi dans la fraternité des hommes et le prouva du côté de Verdun durant la grande guerre, pour sauver nuitamment des compatriotes blessés en première ligne des combats, mais aussi en retournant, sans l’approbation de ses chefs, porter secours à des combattants allemands qui agonisent. « Afin de mieux voir en conduisant (son ambulance) et d’aller plus vite, il ôte son masque à gaz. A son retour, il a les poumons gravement brûlés » (1).
Ancien armateur à Saint-Vaast, dans le Cotentin, il avait baptisé ses trois voiliers Liberté, Egalité, Fraternité et ses deux chalutiers Karl Marx et Jean Jaurès, lesquels sont tous promis à la casse à son retour du front. Ruiné, il sera co-fondateur d’un comptoir de mode à Bruxelles, avant d’émigrer en Algérie, qu’on lui conseille pour rétablir sa santé et d’y relocaliser ses activités.
En 1929, Paul-Hubert vit ses derniers jours : « Devant ses longues souffrances, Max-Pol fait le serment de le venger et d’abattre des Allemands. Son père l’appelle près de son lit et lui fait jurer « de tendre ses mains à l’Allemagne, par-dessus sa tombe, pour la paix des peuples ». Quelques heures après, Paul-Hubert meurt. On l’enterre au cimetière de Saint-Eugène, face à la mer, comme il l’avait demandé » (2).
©Pierre Guérande
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