Le village amaigri se meurt, deuil après deuil ;
Depuis déjà deux générations, c’est l’automne !
Le vieil arbre voudrait que la faux le moissonne
Et le fasse servir à son propre cercueil.
La sève ne peut plus promettre de chatons
Et le prochain printemps n’éclora point de feuilles ;
Cette souche privée de tous ses rejetons
N’a que branches pourries que la bourrasque cueille.
Quelques vieux oubliés se chauffent au soleil ;
La mort a trop longtemps dédaigné leur dépouille,
Elle les a laissés s’emmitoufler de rouille
Et n’inspire pas plus d’effroi que le sommeil.
« Le village sait bien qu’il nous suivra de près »
Pensent ces radoteurs alignés sous la treille,
Il ne restera plus alors que le cyprès
Pour regarder passer les nuées de corneilles.
©Louis Delorme
Extrait du recueil « La Criée – Les Vagissements » de 1974. Recueil imprimé et gravé par l’Auteur sur sa presse artisanale.
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