J’ouvre une nouvelle rubrique, ce jour, celle des recensions de recueils de poésie mais aussi des romans. J’espère que vous aimerez et que vous nourrirez la rubrique ! Jean Dornac
Nous commençons avec une recension qui parle d’un roman de Claude Luezior que vous connaissez bien et que, je l’espère, vous appréciez comme moi ! Cette recension est due à Jeanne Champel Grenier que je remercie !
« MONASTERES »
de Claude LUEZIOR
roman, Éditions Buchet/Chastel, Paris
Claude LUEZIOR écrivain-poète mais aussi médecin neurologue ayant œuvré dans les hôpitaux en Suisse et à l'étranger, et après un voyage marquant sur le Mont Athos où sont implantés une vingtaine de monastères orthodoxes, a naturellement fait un rapprochement entre le retrait du monde choisi par les moines et le degré d'isolement que l'on inflige à certaines catégories de population : nos anciens surtout, mais aussi ceux qui sont atteints de troubles les éloignant de ''la normalité''.
Rassurons-nous, point de dénonciation verbale outrancière, ni de diatribe syndicale. Mais plutôt une mise en abîme de situations et de décisions déshumanisées aussi néfastes que ridicules. L'auteur, avec la finesse d'esprit que nous lui connaissons, se fait l'écho de Beaumarchais qui nous déclare : « Dépêchons-nous de rire de tout, de peur de n'être obligé d'en pleurer ! »
Beaucoup de similitudes en effet entre ces deux mondes, pour un œil averti :
'' L'hôpital est ce monastère blanc qui n'avoue ni sa prière ni sa crasse '', quand bien même ce monde se révélerait '' propre comme un scalpel '' ; le personnel aussi nous rappelle les ordres religieux qui d'ailleurs géraient les hospices d'autrefois :'' Il y a les grands prêtres en aube blanche, avec leurs prescriptions magiques et leurs diagnostics incantatoires... les infirmières vestales... le râle et le sourire... Et souvent la prière et l'espoir. ''
Voici donc le décor bien campé. Place à l'intrigue ! Cléard, vieillard à la forte personnalité, mais atteint de la maladie de Parkinson, est menacé d'enfermement en asile de gériatrie par sa fille déshumanisée par une vie difficile à l'étranger et qui convoite l'héritage. Une fugue rocambolesque, la découverte d'un couple secret, le vol d'une icône de valeur, une rencontre avec soi-même au cœur d'un vrai monastère...où l'on peut lire : '' Et puis, après tant de sainteté, il faut bien que le corps exulte... ''
Les chapitres se suivent comme autant de courts métrages sur un ton imagé, original, intelligent et humain. Claude LUEZIOR, avec la finesse et l'humour qui le caractérisent, va s'employer à nous développer cette histoire qui s'appuie sur cette solitude, compagne de la vieillesse dont on se débarrasse en notre monde, où seuls comptent le rendement et l'argent. Une histoire de respect en perdition, pleine de rebondissements qui fidélisent le lecteur et dont la télévision ferait bien de s'inspirer.
MONASTERES : une saga au rythme endiablé qui nous rappelle ''Vol au-dessus d'un nid de coucou'' et par moments, les truculentes ''Trois messes basses'' d'Alphonse Daudet.
Jeanne CHAMPEL GRENIER