
Présentation par Jeanne Champel Grenier : Peintures de 2015 à 2019
La peinture de Miloud KEDDAR est puissante, sobre à la fois ; c'est celle du geste qui imprime avec force une idée, un sentiment, une douleur. L'artiste est dans l'urgence d'expression, sur une trajectoire terrestre qu'il sait fugace ; il ne s'embarrasse pas de plaire mais de dire, il exprime et imprime un ressenti indélébile, les codes choisis sont simples : tout comme l'enfant qui ne ''représente'' pas mais ''se dit'' tout entier dans le geste.
Il ne s'agit pas ici d'une invitation à la promenade de sérénité :''Venez admirer le coucher de soleil'' Non ! Il s'agit de traces laissées comme les Primitifs sur la roche, afin de marquer un lieu comme sacré, un lieu de mémoire, et pour dire, dans l'urgence l'intériorité de l'homme qui passe, pour marquer cet endroit de façon indélébile. Peindre n'est pas un divertissement, c'est un acte de foi ou de non foi, une quête de sens. Les œuvres de Miloud KEDDAR sont des œuvres symboliques explicites qui indiquent un champ ( parfois un chant) de réflexion profond, un univers de questionnement, mais un univers lié à l'humanité, avec sa douleur, sa cruauté, mais aussi ses ancrages d'amour. C'est un chant de solitude et de silence avec parfois une comète d'espoir qui traverse son univers.
Il est question aussi de ressusciter certaines traditions véhiculées par la religion. Quelqu'un qui cherche l'Absolu se doit de questionner la passé. Certaines croyances ne sont pas inutiles à reconsidérer. Tel est le but que se propose Miloud KEDDAR dans l'oeuvre intitulée « ICON CRISIS VERA » qui signifie icône authentique ( en Grec). Un visage d'homme avec une barbe , un profil stylisé couché à l'horizontale, visage que l'on confond avec des montagnes enneigées et de la végétation, ce profil regarde le ciel immobile avec son soleil fixe, chauffé à blanc, rond, cerclé de noir, le tout sur un fond or, de celui qu'on utilisait pour les icônes ; l'ensemble, très simple, pur, immobile incite à la pose, à la réflexion ; noir qui définit la ligne d'horizon est en fait la continuité du visage, le cou ou bien la tunique.
Ce tableau est vertigineux de silence. Le sujet est né de la tradition de Sainte Véronique pleureuse des Juifs qui aurait par compassion passé un linge blanc sur le visage, couvert de sang et de sueur, du Christ montant au Golgotha. C'est ce geste de piété initié par une femme qui a inspiré Miloud KEDDAR. Ce linceul dit ''de Turin'', controversé, pose des questions : tradition ou geste divin ? Quoi qu'il en soit, l'idée est belle et le peintre reconnaît ici les gestes de courage et de compassion d'une femme ; par le choix de ce sujet, l'artiste met la femme à la place d'honneur que beaucoup lui refusent.
C'est ainsi que l'oeuvre : « ICON CRISIS VERA » aux antipodes de la '' Sainte Véronique'' de Hans Memling ( National Gallery of Washington), provoque notre attention par sa modernité d'inspiration et d'exécution. Il y a de la pureté dans cette composition sobre, équilibrée, et une sorte d'appel à la contemplation. Chaque œuvre de Miloud KEDDAR est à elle seule tout un monde de profondeur qui pousse à la méditation.
© Jeanne CHAMPEL GRENIER
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