La vieille est toute seule au fond de sa cuisine,
Ressassant sa pensée en guise de croûton ;
Elle avait dix-huit ans la belle Margoton
Qui gardait son troupeau, là-bas, dans la ravine.
Sa vie devant ses yeux, toute floue, se dessine ;
Le mariage arrangé, le dernier enfançon,
Les proches que l’on porte au tout premier frisson
Dans un linceul de pluie vers la froide vermine.
Les enfants l'ont laissée, tous les parents sont morts,
On dirait que la faux ne veut plus de son corps.
Les pleurs l'ont tant ridée, les chagrins tant confite
Qu'elle ne vaut quasi plus le dérangement,
Et la Camarde oublie de lui rendre visite
Son œuvre étant d'avance en cours d'achèvement.
©Louis Delorme
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