31 août 2016
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Recension : Christian Malaplate - « Feuilles de route sur la chevelure des vagues. » Editions les Poètes français. » - 2016 - format 15x21- 83 pages.
Indéniablement il s’avère nécessaire d’aborder l’ouvrage de Christian Malaplate « Feuilles de route sur la chevelure des vagues. » comme un long carnet de voyage où déferlent les images et émotions noyées de brume et d’écume.
C’est un livre de bord consignant les phases de vie et d’expérience.
Christian Malaplate joue sur la force et l’agencement des mots dont la trame révèle une richesse extrême.
Le verbe est ciselé comme un bijou d’Ispahan. L’écriture impose sa couleur, le langage est presque d’un autre temps. Nous voguons entre poésie, légendes et narration. Ce besoin de conter, cette volonté narrative en arrivent parfois à faire que la poésie se retrouve au second plan.
Environné des poèmes et textes de Christian Malaplate, je me sens dans la bibliothèque d’un érudit, d’un philosophe ou d’un moine copiste environner de parchemin enluminés.
L’allégorie même de l’esprit d’un lettré de haute connaissance.
« .../...parmi les enluminures et les sombres cloîtres. »
« Où s’agglutinent les tableaux familiers dans une bibliothèque pleine d’anticipation. »
Notre poète joue avec l’étrange, le mystère, les ambiances insolites en rendant hommage à la mémoire.
« Il y a des fleurs maladives qui chantent des poèmes d’amour mystiques. »
Le voyage se poursuit dans un univers fantastique, irréel ou l’on ne discerne plus la part du réel et celle de l’imaginaire. Nous côtoyons un mysticisme latent, la formule alchimique n’est jamais très loin.
« Parmi les teinturiers de la lune et leur étrange alchimie. »
Christian Malaplate sait souligner les aspects fragiles de la vie, les humbles instants de bonheur et de plaisir, le souffle léger de la femme aimée sur l’épaule dénudée, le jus parfumé des fruits de l’amour.
L’amour recèle ici des effets de magiques métamorphoses.
« L’amour, dans nos moments intimes, modelait nos corps. »
Une poésie nourrit de réflexion qui nous transporte haut et loin. Sorte de panthéisme latent, la proximité avec la nature est évidente, je dirais même incontournable, car que serait l’homme sans elle, sans cette fabuleuse fusion universelle ?
Rien ! Il n’existerait même pas.
Cependant son orgueil et sa suffisance aveugles font qu’il a tendance à oublier l’enjeu, sciant dans son acte irresponsable la branche sur laquelle il est assis, tout en piétinant le jardin qui le nourrit.
Il est fréquent chez Christian Malaplate d’écrire sur les traces du rêve, de nourrir son encre de symboles universels, des sèves de la nature, il tente de fixer l’éphémère en quelques vers.
Il demeure attentif aux chuchotements de la nuit, aux chants des étoiles et aux murmures des arbres séculiers. Il s’exile tel un poète ermite dans ses grands espaces de paix et de solitude intérieure:
« Je pars en suivant les empreintes de la terre et le baiser du vent.../... »
« Pour retrouver la confiance du monde extérieur. »
La nuit occupe une place prépondérante dans la poésie de Christian Malaplate, elle est révélation, se fait vectrice d’images indéfinies, le noir devient lumière, éclat d’écume et sel légendaire. Par la poésie ce dernier retour à la substance mère, il y poursuit sa voie initiatique, une quête conviant à l’harmonie.
Bien au-delà des religions, des dogmes infantiles, des semons aliénants, il caresse la philosophie, la sagesse indienne afin de se préserver au mieux des apparences et du paraître.
Christian, Malaplate côtoie les interrogations métaphysiques, interroge l’universel et les lois cosmiques autant que puisse.
Sans oublier la question suprême et incontournable de la création, du mystère de l’humanité.
Est-ce « Dieu » qui créa l’homme ou plutôt l’homme qui s’inventa des « dieux » ou un « Dieu » ? Par nécessité de référence à des forces supérieures.
L’interrogation demeure en suspend ! Qui en possède la clé ? Les poètes peut-être par instinct ou intuition.
Avec humilité Christian Malaplate ouvre une voie, qu’importe la finalité, il chemine. Le carnet de route à la main avec l’extrême conscience de notre fragilité humaine. L’interrogation oscille entre le Taj Mahal une des merveilles universelles et l’ombre d’une grande âme indienne Rabindranath Tagore rôde, la symbolique ésotérique du Khajurâho interroge, ainsi que le mystère sacré de Bénarès qui nous ouvre les portes du nirvana.
Retour aux sources de la sagesse, du bon sens des philosophies indiennes. Force est de constater que pour l’heure depuis Ghandi, Tagore, Aurobindo, Krisnamurti, notre siècle est en perte de valeurs, d’idéaux et de repères identitaires dont nous aurions de plus en plus besoin.
Devenu porteur de mémoire Christian Malaplate cherche le vrai « dieu » d’amour, l’espoir demeure il porte en lui un futur à construire, mais pourra-t-il réellement l’ériger.
En ce temps d’éveil et d’interrogation une réponse possible se trouve-t-elle peut-être dans le symbole eucharistique.
En mémoire de son grand père ayant perdu toute certitude en l’homme après un passage en enfer de quatre ans 1914-1918 sur le tristement célèbre « Chemin des Dames. » que je connais très bien et où l’herbe un siècle plus tard n’a pas toujours repoussée partout.
« J’ai surtout perdu mes certitudes en l’homme et je cherche toujours un dieu d’amour. »
Mais confiant en l’acte de poésie notre porteur de mémoire, Christian Malaplate poursuit ses rêves et chimères.
L’œuvre continue, le meilleur restant à venir et nous l’attendons !
©Michel Bénard.