29 juillet 2016
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Poète et écrivain français, 1848-1900 -
Extrait de « L’Heure Enchantée »
Merlin revient d’Écosse. Il a tant navigué,
Tant livré de combats et pris de citadelles,
Qu’à la fin, par Saint George, il se sent fatigué.
Mais dans le clair matin glissent des hirondelles
Et Merlin, par les bois, cueille la fleur d’oubli.
Son coeur, prêt à renaître, est loin des infidèles.
L’âge courbe son front, les veilles l’ont pâli.
Bah! d’un jeune garçon il revêt l’apparence.
On dirait à le voir un écolier joli.
Tout rit. Le ciel est bleu, du bleu de l’espérance.
L’escarcelle au côté, la plume au chaperon,
Merlin est plus gaillard que le soleil de France.
Il s’amuse, en passant, du vol d’un moucheron,
D’un lièvre qui s’enfuit, d’une chèvre qui broute,
D’un bourdon qui bourdonne au coeur d’un liseron.
Des oiseaux chantent. Lui, gravement les écoute.
Il respire les fleurs, il regarde le vent
Faire danser de folles ombres sur la route.
Et c’est ce grand Merlin, brave autant que savant,
Qui tranche deux païens d’un coup de son épée,
Et parle mieux latin qu’un moine en son couvent.
Gabriel Vicaire