17 décembre 2015
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Recension : « Nos saisons humaines » de Nathalie Lescop-Boeswillwald. Editions NLB.
Préface Christian Boeswillwald. Illustrations en quadrichromie Madalena Macedo.
Format 18x18. Nombre de pages 45.
Le train glisse dans une nuit profonde et encore sombre. Cinq heures du matin entre Reims et Paris.
Ce nouveau recueil : « Nos saisons humaines » de Nathalie Lescop-Boeswillwald est là, entre mes mains. Alors je me demande si le préfacier Christian Boeswillwald s’est déjà posé la question de savoir si écrire une recension ne laisse pas aussi l’émotion vous gagner, sachant que l’auteure est une amie fidèle et de longue date, car la voie est déjà en partie tracée, alors nul droit à l’erreur au risque de dériver.
Ce recueil est déjà un hymne à la vie, combien même les saisons s’y profilent lentement et où apparaissent ici et là quelques feuilles rousses et empourprées.
« Dans le fouillis des herbes hautes
Aujourd’hui, c’est l’automne…/… »
Expression poétique et picturale dialoguent, s’équilibrent, se valorisent et se rehaussent l’une et l’autre au travers une émotion complice.
Les poèmes sont enluminés des œuvres imaginaires de Madalena Macedo et se questionnent en silence autour d’un vol d’oiseaux migrateurs.
« Ils sont là, sous nos encres de lune pâle,…/… »
« Un regard vers le ciel, quelques oiseaux en vol serré…/… »
Telle une mélodie accompagnatrice nous côtoyons ici la confidence, le souffle retenu, la réflexion, la sagesse et en récurrence l’emprise du temps à la fois ami et ennemi.
Alors sans trop se l’avouer on grime, on détourne les premiers signes venant altérer les méandres da la vie.
« Que la mémoire enjolive au fil des ans…/… »
Entre les lignes de ces poèmes il nous arrive d’entendre les feuilles crisser, mais très vite de nouveaux bourgeons gorgés de sève éclatent à la vie.
Des images simples mais éloquentes habitent ce recueil jalonné de formules émouvantes tout autant que pertinentes.
« Il est des janviers qui épousent septembre…/… »
Des textes portant toute l’expérience de la maturité sans oublier leurs attaches aux racines, aux territoires de l’enfance. Cependant latente, une profonde blessure est présente, sourde, discrète et redondante à la manière d’un mouvement pendulaire.
La beauté naturelle de certaines poésies nous émeut de tant de pertinence, de suggestions révélatrices. Emouvante surprise où l’émotion nous touche, nous taraude. Chapelets d’images d’une grande noblesse évocatrices et poétiques :
« Quelque part…Ailleurs
Une tendresse en renaissance en lisière océane
Et qui n’attend qu’un signe…/… »
Joie avouée de croiser des souvenirs et des visions de doigts dans l’encre violette à la Doisneau, précisément où c’était encore le temps des plumes « Sergent Major » avec parfois quelques accents verlainiens :
« Septembre…
Se risquer au silence
Pour sauver
Ce qui peut l’être encore… »
Nous percevons chez Nathalie Lescop-Boeswillwald une poésie remplie de sèves multiples, nourrit d’humus et se désaltérant de perles de rosées.
Il est un poème que je soulignerai, non pas pour son aboutissement stylistique, mais pour sa fréquence sentimentale, son élévation émotionnelle, il s’agit d’un texte d’une fille à sa mère rythmé par :
« Un unique refrain, je t’aime…/… »
Et le seul battement de :
« Deux cœurs cousus l’un sur l’autre. »
Cet ouvrage est une incantation, une communion avec la fondamentale simplicité et pourtant cruelle de la vie.
Au travers de notre pérégrination, il arrive de croiser sur notre chemin, une amie coutumière et fidèle des poètes, « Dame nostalgie » sous un ciel lourd de neige et de lumière blafardes.
Alors notre poétesse profite des ambiances de cet univers en filigrane pour se mettre en recueillement du monde et de s’efforcer à percer les brumes de l’éternité où :
« Le poète retrouve le chemin du verbe…/… »
Scènes simples, séquences de mémoire, pages bucoliques, celles en fait qui ouvrent les portes les plus proches sur la vie, parce que vraies !
Ici je vous convie à oublier le temps qui s’effiloche, à laisser les heures s’égrener, mais surtout à préserver :
« L’envie de vivre ici et maintenant. »
©Michel Bénard.
Lauréat de l’Académie française.