9 mai 2015
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Photo J.Dornac©
Eglantine vivait seule sur une colline. Les arbres, les fleurs, les oiseaux ainsi que tous les animaux de la forêt étaient ses amis. Un chat blanc et une pie ne la quittaient pas : un chat affamé de caresses, une pie familière comme un pigeon de cathédrale mais si voleuse qu’un jour la jeune fille lui dit : « Puisque tu te crois très douée, je vais te demander un service ; je te préviens, c’est un service spécial qui réclame esprit d’initiative, voire d’aventure. »
« Alors c’est à ma portée » répondit la pie pleine d’orgueil. Mais avec une pointe d’inquiétude, elle demanda : « De quel service s’agit-il ? »
« Oh, il s’agit tout simplement d’aller dérober au soleil un de ses rayons ! »
« Rien que cela, et pourquoi pas décrocher la lune ? »
« Mais bel oiseau moqueur, ce n’est pas à ta portée, c’est tout ! Cependant, je vais te donner un conseil : vole jusqu’à la mer et, là, attends l’heure mauve, celle où le soleil se couche en épousant les flots ; tu verras, ses rayons sont tout doux, rafraîchis par les vagues. Alors, à ce moment-là, tu cueilleras le plus pur rayon d’or ».
La pie, sans un regard, s’élança vers le ciel et disparut, absorbée par la brume.
Les jours et les semaines passèrent. L’oiseau ne revint pas. Il avait peut-être suivi la mouette dans son royaume d’algues et de sable, il avait peut-être voulu goûter au baiser froid de la mer, ou tenté de découvrir les chemins de la voie lactée vers l’inaccessible étoile…
Eglantine ne céda par au remords d’avoir demandé à la pie une tâche aussi difficile. Il a pourtant essayé de s’infiltrer en elle. Mais la petite flamme rose de l’espoir veillait et le remords qui craint la lumière n’insista pas.
Et un matin tout neuf rafraîchi par une pluie cristalline, elle le vit apparaître à la fenêtre. Elle était si heureuse de le revoir, qu’elle ne remarqua pas tout de suite l’une de ses plumes, toute tissée d’or. Mais c’était son rayon de soleil, elle n’en croyait pas ses yeux ! Elle tira sur le fil qui se déroula facilement. L’oiseau la regardait : dans ses yeux, elle lut sa fierté d’avoir accompli une aussi belle mission, mais elle y vit aussi les reflets du soleil se baignant dans la mer et la vague d’émeraude jouer avec la mouette. Elle y vit tout cela et tellement plus encore. Mais comment le dire ? Elle avant beau chercher, elle ne trouvait pas les mots mais son cœur savait et c’était l’essentiel. La pie lut le message et s’envola sans toucher au repas qu’elle lui présentait, rassasiée d’une autre nourriture.
Quant au rayon d’or, Eglantine le déposa dans l’un des tiroirs de son cœur, pour qu’il l’ensoleille à longueur d’année et fasse fleurir dans ses yeux tout un jardin où chacun pourra cueillir une pensée de joie, de tendresse et d’amour…
©Michèle Freud
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