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21 février 2015 6 21 /02 /février /2015 08:45
Pomélia – Béatrice Pailler
 
 
 
                        Extrait de La Pierre Sèche
 
 
…Pomélia, les années se sont enfuies et les jours cruels se sont tus. Ton nom n’était pas fait pour l’oubli ; aile de nuit posée sur les lèvres closes, il s’est tapi et repose dans les pensées des gens d’ici. Son empreinte, en demi-teinte pâlissante, et sa musique charnelle ont simplement survécu, dilué, dans l’assoupissement des heures passantes.
 
Autrefois, Pomélia la vagabonde, guérisseuse itinérante de son état, voyageait de par le pays. Elle vivait humblement d’aumônes et de cueillettes. Cherchant les sources, elle hantait la forêt et le soir venu, ralliant la misère nichée dessous la ramée, elle se chauffait aux feux mourants des charbonniers. Elle aurait pu s’établir en marge d’un village et devenir une rebouteuse crainte mais connue ; la découverte de la Pierre Sèche scella son destin. Elle mit fin à son errance et s’installa dans la quiétude de cet enclos verdoyant. Loin de la communauté des hommes, elle bâtit sa chaumine au plus près de l’antique table de granit rougi…
 
…Silhouette longiligne enlacée de lune, on pouvait la croiser de nuit cueillant ses herbes. Nul mot ne franchit jamais ses lèvres et si la langue des hommes lui était refusée, d’aucun affirme qu’elle parlait celle des bêtes. En ces jours de ténèbres, l’infirmité d’autrefois devenait disgrâce divine. Certains disent que la pierre, sentant sa présence s’éveilla et chanta pour elle. L’attirant toujours plus profondément au sein des douceurs forestières, elle la guida vers le ruisseau et ses berges, où enchâssée dans la glaise, elle attendait la main qui s’attardant sur la soyance sanguine de sa robe grenue oserait la caresse qui délivre. Et du jour où Pomélia toucha la pierre, tout en elle changea. La Pierre Sèche la délivra de la peur et lui donna sa force et sa connaissance. Alors, vint le temps des métamorphoses, sa crinière rousse s’enflamma, sa peau claire prit la pâleur argentée de la lune et ses lèvres groseille devinrent velours de sang. Image mythique de la vouivre malfaisante, elle est Pomélia la malvenue et dans l’opulence confuse de sa chevelure, cuir brulé, les entrelacs rutilants de ses mèches, sorbes mûrs, se convulsent sous les feux lunaires et s’épanchent, libres et ondoyants, sur son corps si blanc. Ainsi, va la légende de Pomélia, à la limite du réel, entre vérité et mensonge…
 
© Béatrice Pailler 2014
Texte extrait de la nouvelle La Pierre Sèche
Edition du Lavoir-Rosnay in Recueil N°4 Chez l’une Chez l’autre
 



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